Un parc, un lac et un îlot de voisins inquiets

Un parc, un lac et un îlot de voisins inquiets - Rémi Tremblay : Actualités

L’ancien et le nouveau bâti sur le boulevard des Vétérans semblent séparés par une barrière invisible. Mais c’est surtout l’utilisation du parc qui cause des inquiétudes au voisinage.

À l’ombre du nouveau centre-ville en construction, et voisin du parc des Vétérans, tout un quartier habité vit avec un profond malaise la possible concrétisation d’un projet touristique majeur. Bien que ces résidents n’entendent plus parler d’ «Un parc, un lac», depuis plusieurs mois, l’inquiétude persiste. Leur unique protection pour l’instant, la Direction de Santé publique de l’Estrie qui reconnaît la fragilité d’une «communauté vivant dans un contexte post-tragédie».

«Les habitants de ce quartier sont, pour la majorité, des personnes ayant été fortement exposées à la tragédie et ses conséquences. Le parc (des Vétérans), pour une partie de la communauté, est un symbole fort de la région et de la résilience» notait en octobre 2018 l’Équipe de proximité qui a été interpellée par les citoyens du quartier quand les promoteurs ont annoncé le projet, à l’automne 2017.
Dans une pétition portant une quinzaine de signatures livrée aux autorités municipales, ces résidents de la rue Kelly, Grégoire et une partie du boulevard des Vétérans ont pris position contre le projet, mais sans faire trop de vagues, pour éviter d’être montrés du doigt. Leur cause: défendre le droit à une vie de quartier en toute quiétude.

L’homme qui se confie à l’Écho est un résident du quartier: «On vit dans le bruit et la poussière depuis presque sept ans. Le stress post-traumatique va nous suivre probablement jusqu’à la fin de nos jours.»
Qui sont-ils ces citoyens? Des jeunes familles, des cols, blancs, des cols bleus, des retraités qui ont dû fuir en vitesse la coulée de flammes le 6 juillet 2013.

Des lendemains difficiles, puisque la plupart d’entre eux se sont retrouvés avec des symptômes post-traumatiques: angoisse, insomnie, colère, sentiment d’impuissance, anxiété. Puis, quatre ans plus tard, en septembre, les symptômes sont ressortis quand un groupe de promoteurs a fait l’annonce du projet «Un parc, un lac» devant un public enthousiaste, au Cinéma Mégantic. «Projet unique et ambitieux», a titré l’Écho, décrivant une vision futuriste du parc que les promoteurs disaient réalisable, avec l’apport de technologies multimédias, des projections interactives, une plateforme amenant le visiteur à une immersion à sec directement dans le lac et l’aménagement d’une île flottante. «Il faut nourrir de grands rêves. Notre ambition pour Lac-Mégantic, qu’elle devienne la plus grande des petites villes au Canada», lançait à l’époque l’un de ses initiateurs, Mario Morin.

Depuis le dévoilement du projet, les élites locales se sentaient investies de la mission de développer le centre-ville selon une vision purement économique, croit l’interlocuteur qui préfère ne pas être identifié. «Tu ne peux pas ne pas tenir compte du voisinage qui vit encore là!»

Les résidents du quartier ont trouvé une oreille attentive auprès de l’Équipe de proximité mise en place par la Direction de la santé publique de l’Estrie au lendemain de la pire catastrophe ferroviaire au pays. «Un projet sans nous consulter? Je n’ai pas dormi de la nuit. J’ai envoyé un courriel à Mélissa Généreux (la directrice de la Santé publique). Elle a pris ma demande très au sérieux. C’est à partir de là qu’on a rencontré les travailleurs sociaux de l’Équipe de proximité.»

En décembre 2017, lors d’une première rencontre avec les citoyens concernés, des besoins communs ont été identifiés: le besoin de s’informer et de comprendre le projet de développement touristique. On y note que «le flou entourant ce projet nourrit le sentiment d’impuissance et l’anxiété.» On mentionne aussi le besoin de s’exprimer et d’être entendu.

Vivant un sérieux malaise à l’idée qu’un jour le parc public devienne un flamboyant parc d’attraction, les «voisins» ont formé un comité pour faire part de leurs doléances aux élus. Pour tenir leurs réunions, plutôt méfiants, ils ont préféré le sous-sol de l’église Sainte-Agnès au local mis à leur disposition à la gare patrimoniale par les autorités municipales. L’Équipe de proximité a servi d’intermédiaire entre les citoyens et la Ville. Leur bouclier, l’acceptabilité sociale, une notion primordiale pour tout projet d’envergure touchant le centre-ville à reconstruire.

«Maintenant on fait partie d’un processus d’acceptabilité sociale; ils doivent en tenir compte», insiste le résident.

Le 5 mai 2018, il y a eu une rencontre des sinistrés avec la mairesse à l’hôtel de ville. «On s’était fait dire que la mairesse n’était pas au courant du dossier. Nous autres, on a mis notre santé sur la table. On n’est pas des mécontents, on est malades! Nous, les premiers concernés par le projet, on est tassés, on n’est pas consultés. C’est clair qu’il y a une volonté de nous contourner, ils ne peuvent pas nous ignorer.»

Dans la dernière consultation publique tenue par la firme votepour.ca le projet «Un parc, Un lac» a disparu de la deuxième version du sondage. À la question «Selon vous, dans quelle mesure les projets en développement suivants auront un impact positif dans la reconstruction du centre-ville de Lac-Mégantic?», il ne restait plus que la liste suivante: le Marché public, le projet d’hôtel, la marina-restaurant, l’Institut en culture de sécurité industrielle Mégantic, le Quartier artisan, l’Espace Jeunesse et la poursuite du Triathlon.

«Rien n’a bougé depuis l’automne dernier, rassure Mario Morin. Le dossier est encore à l’état embryonnaire.» L’initiateur du projet confirme que c’est l’organisme Lac en fête Mégantic qui est le porteur du dossier et qu’il y a bien eu une étude de faisabilité réalisée l’an dernier quant à la viabilité du projet.

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