Nostalgie de la St-Jean

Nous vivons entourés de fantômes. Après le dégel de la terre, quand juin arrive, il me semble encore apercevoir Léandre Breton sortir sur la galerie de la maison d’en face du bureau avec son violon. Levé aux aurores, il hume le printemps et respire le bonheur. À la mi-journée et le soir venu, le temps de bien placer sa chaise et de soulever l’archet, le voilà qu’il se met à pousser la note.

Léandre faisait et fait encore partie de ce qu’on peut appeler nos personnages populaires, notre patrimoine vivant, ceux-là qui ne changent pas le monde avec une baguette magique, mais qui rendent le monde meilleur par des gestes aussi simples que de lancer un «reel» de l’Île-aux-Coudres sans le souci de jouer nécessairement la bonne mesure. Mon père était comme ça, au piano, sans n’avoir jamais suivi de cours. Il jouait les notes à l’oreille. C’était ça, pour lui, la grande évasion emballée dans un tout petit moment de bonheur.

Le boulevard des Vétérans n’est pas la Place des Arts! Léandre s’exécutait le plus souvent sans public. Quelques passants s’arrêtaient, sourire aux lèvres, tapant du pied. Un bon moment de détente sans prétention et sans décorum. Le parfait tableau bucolique sur une page de calendrier.

On savait que l’été s’en venait quand les employés de la ville et des bénévoles accrochaient des dizaines de petits drapeaux du Québec aux poteaux, devant le parc, au son du violon et de la musique populaire. Et on amenait les barrières pour sécuriser le périmètre. Le 24 juin, célébré le 23, donnait le signal que les classes étaient finies et que les vacances des enfants commençaient. Et les vacances des parents! La cassure entre le maudit hiver toujours interminable et l’été toujours trop court qui passe toujours trop vite.
La fête du solstice, encore dans les jours les plus longs mais toujours pas les plus chauds. Le poncho était à la mode intemporelle! La Saint-Jean, c’était la fête de tout le monde, du gars qui arrivait dans le parc en bedaine, déjà pas mal réchauffé, des petites familles tentant de pousser le carrosse entre les attroupements improvisés, comme du notable bien «swell» qui se tirait une chaise pour être aux premières loges pour le discours national du maire et de député, en souhaitant pas trop se faire cacher la vue par les fêtards pendant le spectacle du chansonnier. Nos voisins des localités environnantes s’invitaient au grand rassemblement. Ils ne venaient pas assister à un concert de U2, non, juste pour s’amuser en famille et renouer avec les connaissances.

Léandre était du groupe de la Société Saint-Jean-Baptiste qui se faisait un point d’honneur d’organiser la Saint-Jean, longtemps même avant que ça s’appelle la Fête nationale. Pour les membres de ce mouvement, ce n’était pas une question de mandat ni de budget encore moins de couleur politique partisane, mais bien une démonstration de fierté nationale de vouloir bien faire les choses, avec décorum. On perpétuait une très très longue tradition, de mémoire d’hommes et de femmes!
C’était! J’insiste… c’était! Genre, «dans le bon vieux temps ça se passait de même; ça se passait de même dans le bon vieux temps!»

Je ne veux pas parler de mauvaise foi ni prêter de mauvaises intentions à quiconque mais les explications de la ville et du Lac en fête pour dire qu’il n’y en aura pas de fête nationale cette année, qu’il faut s’habituer, ça ne passe juste pas! Comme si on nous prenait pour des ti-counes qu’on décide de priver de dessert parce que… on ne sait trop pourquoi!

Les théoriciens du complot interplanétaire feront le lien avec l’intention de Philippe Couillard d’ouvrir le débat constitutionnel, en cette année du 150e du Canada. Alors, la Fête nationale, surtout soutenue par Québecor, c’est peut-être pas une bonne idée! Peut-être que Philippe en a glissé un mot au maire! La Fête nationale sonne peut-être trop… nationaliste?

J’ai pas pu m’empêcher de regarder la réaction du monde sur les réseaux sociaux. Le party est pogné sur la face de bouc! Paraîtrait que les Français de Dourdan ont plus le sens de la fête nationale des Québécois que nos «autorités» qui viennent de débrancher le nationalisme qui sommeillait en nous. La vieille France a plus le sens de la fête nationale qu’icitte! Sont pas gênés eux autres de se dire nationalistes! Non, chez eux si tu fêtes ta nation, t’as pas besoin de baisser la tête et de regarder le plancher. T’as pas honte d’être fier! Nos «jumelés» vont célébrer le Québec en pensant à nous! À notre place! Pauvres nous!

Dans le communiqué de la Ville : «Dans toutes les communautés, les citoyens sont sollicités pour faire du bénévolat dans plusieurs événements. Le recrutement de bénévoles n’est pas facile. De plus, en regard de nos objectifs budgétaires, nous ne pouvons augmenter la subvention de cet organisme», ajoute le maire. J’aurais préféré une explication plus honnête ! Genre : «Le Lac en fête a un problème de budget. On leur a allongé une avance l’an dernier sur 2017 pour les renflouer. Pas question d’augmenter! Aujourd’hui, faut couper! Et ne pas épuiser les bénévoles qu’on aura besoin pour le CanadaMan/CanadaWoman.»

Heureusement, en dernière heure on apprend que la Fête nationale est sauvée. La Commission des arts et du patrimoine a pris les choses en main. Il y aura un party! L’honneur est sauf! Léandre n’aura pas à venir hanter nos autorités. Mais tendez l’oreille… N’entendez-vous pas le son de son violon?

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