Oscar Brochu

La métamorphose du papillon

J’avais d’abord songé à écrire sur «la cassure», pour tenter de dépeindre le climat social qui règne au Québec depuis l’adoption de la loi spéciale 78 des libéraux de Jean Charest, appuyés par les néo-libéraux de François Legault.

La «cassure» non pas entre les générations, les jeunes contre les vieux, ni entre la droite et la gauche, mais plutôt entre ceux qui résument grossièrement la crise étudiante en un coup de tête «d’enfants gâtés qui voudraient étudier sans payer leur diplôme» et les autres qui comprennent que l’entêtement du gouvernement majoritaire à imposer la hausse des droits de scolarité est, sinon une erreur, à tout le moins un geste précipité, guidé par un vulgaire agenda politique mal calculé.
La loi 78 se voulait une assurance du retour à la paix sociale, entonnent en chœur les voix libérales, elle n’a eu que pour seul mérite de jeter de l’huile sur le feu et à mettre à mal les libertés individuelles.

Entêté à ne rien céder aux associations étudiantes, le gouvernement Charest a bien involontairement, j’imagine, j’espère, replongé le Québec dans ce climat de suspicion qui régnait lors des deux référendums sur la souveraineté. Cette fois, d’un côté les «méchants carrés rouges désobéissants» et de l’autre les tenants de la loi et l’ordre. Même absurde, une loi spéciale est une loi à laquelle il faut obéir, clament-ils.

Même si la Loi 78 est une insulte à l’intelligence, elle doit être respectée. Sinon, les infractions seront salées.

J’avais songé à écrire que le ministre des basses œuvres du gouvernement Charest, celui qui porte le dossier de la Justice, Jean-Marc Fournier, en avait rajouté, mardi, quand il avait vulgairement associé la «désobéissance civile» au «vandalisme»! Un chanoine tout droit sorti de l’ère duplessiste, notre ministre de la Justice.

Où cette loi 78 nous a-t-elle conduits jusqu’à maintenant? D’une part, les associations étudiantes et communautaires du «monde libre» appuient les revendications des étudiants québécois et de l’autre, la Russie prête à ériger une statue à l’effigie de Jean Charest sur la Place rouge, parce que sa loi 78 les inspire à augmenter les amendes aux groupes qui ne se conforment pas aux lois de leur pays. La Russie, crisse! C’est vrai qu’au nord, le pays de Poutine frôle les rivages du Québec et que la Sibérie, comme le nord québécois, a des airs de terre d’accueil pour Jean Charest, mais y a quand même une limite à ne pas franchir.

J’avais songé à écrire la colère et la rage des jours qui ont suivi l’adoption de la loi 78, les soirées de matraque dans les rues de Montréal, transformées en champs de bataille par la force du pouvoir, les scènes disgracieuses d’abus et de brutalité. Mais bon, paraît que, dans les circonstances, la police fait un travail exemplaire, diffusent les grands médias, peu critiques face aux écarts de conduite, aux injures, à l’intimidation des «agents de la paix».

J’avais songé à écrire que les images à la télé, ces dernières semaines, démolissaient le travail de tous ceux qui dénonçaient l’intimidation dans les cours d’école. Quand tu as la loi au bout du bras, l’intimidation est permise, à l’égard de tous. Frappe au hasard, bouscule, crie «bouge, bouge, bouge», sors la poivrière, fait peur aux touristes, tout est permis!

J’avais songé à décrire une situation chaotique, improvisée, décriée de partout à travers le «monde libre» jusqu’au moment de cette révélation, la métamorphose du papillon. Quossé?

Parce que notre monde change, la peur s’est installée. Oui, nos gouvernants ont peur. Peur que l’ordre qu’ils ont établi selon leurs règles à eux, se rompe. L’ordre est menacé par les jeunes ? On va leur montrer à obéir. Sont têtus ces jeunes ! On les prenait pour des gens tranquilles, acquis. Charest leur a pourtant dit : «Retournez à l’école et laissez-nous travailler en paix!» Les petits malins comme des singes auraient pu lui répondre, «retournez à vos devoirs et laissez-nous étudier !» Mais non, le monde a changé ! La nouvelle capacité de mobilisation par les médias sociaux a fait en sorte que, cette fois, les étudiants n’ont pas plié. Et les parents non plus. Et les grands-parents non plus!

Au gouvernement, on a souhaité qu’ils restent dans leur cocon, mais une fois les ailes déployées, les papillons font leurs propres choix. Il aurait du comprendre ça notre bon ministre de la Jeunesse!

Ils sont jeunes et ils sont différents, c’est normal. Désobéissants? Je dirais plutôt inspirants! Intelligents dans le discours et dans l’action.

Plutôt que de céder à la panique et à la peur, le premier ministre de «tous» les Québécois, qu’on le veuille ou non, aurait dû s’asseoir avec les leaders étudiants, au lieu de nous enfermer tous en punition dans notre chambre. Au nom de la loi!

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