Baie des Sables

Le train de la discorde

Le 2 décembre dernier, j’ai participé à la rencontre de concertation organisée par l’Office des ­Transports au sujet de la voie de contournement. Après avoir été observateur en ­après-midi, j’ai pris la parole en soirée, mais on ne m’a pas applaudi. Je m’y attendais. Depuis quelques années, exprimer ses convictions en toute transparence, et ce avec tout le respect possible, si elles sont en dehors du consensus confortable et non choquant, vous place dans une situation de pestiféré. Vous devenez une personne à ne pas côtoyer et une cible à pourfendre. C’est un risque réel que j’assumerai et on pourra me crucifier sur la croix de ces convictions. J’y ai entendu toutes sortes d’arguments, du plus n’importe quoi au plus réfléchi. J’ai même entendu un maire traiter notre mairesse de menteuse en public. Wow ! ­La salle était « pactée » , les « bons contre » à gauche et les « méchants pour » à droite. L’atmosphère, vous l’imaginez, était tendue. Notre député (dont on ignore la position sur le sujet et qui habite à 100 mètres de l’actuelle voie ) était à s’occuper de nos affaires ailleurs.

Alors que se déroulait l’assemblée, j’en suis venu à la conclusion évidente que nous n’y arriverons jamais à savoir nous entendre entre nous. Tous, si on voulait y mettre un tant soit peu de réflexion et surtout de bonne foi, conviendraient que le passage journalier et répétitif de convois interminables dans un milieu urbain, près d’un lac en plus, et chargé à bloc de toutes sortes de matières dangereuses représente un risque potentiel permanent. La triste preuve en a été faite il y a 12 ans. Alors où ­devrait-il passer ? ­Veux, veux pas dans la cour de quelqu’un, c’est certain ! ­Quel quelqu’un ? L’histoire a fait que la ville n’a pas de territoire. Ça aurait été si simple autrement ! L’entente entre nous se révélant impossible (à croire que ça arrangeait certains), et bien, ce sera encore comme pendant l’après- tragédie, des politiciens sans connections avec le milieu et appuyés par une panoplie d’experts trancheront la question pour faute de consensus. Après tant de tergiversations, il n’y aura aucun gagnant : que de l’animosité entre voisins, de l’amertume, des gros mots, pour certains des pertes financières, du stress psychologique, des craintes et des incertitudes et j’en passe… ­Malheureusement ! ­Pourtant l’évidence du danger ne se dément pas et des correctifs sont nécessaires.

Nous n’arrivons pas à nous entendre parce que nous refusons de part et d’autre de voir et d’admettre notre interdépendance : exercice difficile, mais obligatoire si nous voulons vivre et prospérer dans notre coin (­admettons-le) un peu à l’écart du ­Québec. On semble toujours privilégier le ­moi-je sur le nous collectif. Une réaction sans doute naturelle, mais combien dévastatrice dans ce dossier !

À ­Lac-Mégantic, ville centre industrielle et nécessairement de services, on retrouve des écoles primaires et secondaires, un cegep ( permettant des économies substantielles aux parents voulant « pousser leurs enfants ), un hôpital et une nouvelle maison des aînés, un poste de police, une caserne de pompiers, un centre d’achats, des commerces de proximité, des bureaux administratifs ( ­GVT, organismes communautaires, assurances, services sociaux, notaires, avocats …. ) un centre sportif, des hôtels et des restaurants, une marina, même un ­Tim ­Horton, c’est pas rien et la liste pourrait se rallonger. Nous supportons aussi toutes les infrastructures pour les grandes industries (à grands frais parfois) . C’est dire que la ville est un pôle attractif incontournable et majeur pour l’économie. Qu’ils soient de la ville, de ­Frontenac, de ­Nantes ou de la région, tous y trouvent leur compte.

Dans le dossier de la voie de contournement (tous les trop gros égos confondus), des erreurs ont été faites. Nos politiciens en feront encore, c’est certain. ­Peut-être ne se ­sont-ils pas assez ÉCOUTÉS, encore ­fallait-il sincèrement le vouloir ! ­Je l’ignore. Ce que je sais par contre (il serait de mauvaise foi de le nier), c’est que le vivre ensemble ne peut que se faire ensemble.

Actuellement, nos voisins si proches ne mettent leurs gilets méganticois que quand ça les arrange. Leurs fiscalités municipales respectives, majoritairement, proviennent ou de la route 161 (résidences riveraines de haut niveau ) ou de ­Laval-Nord (commerces et développement résidentiel ). Je crois sincèrement que ces résidents s’identifient beaucoup plus comme des citoyens de la ville. Un chat sera toujours un chat. La plupart privilégient le » nous « pour leur ­gagne-pain et leurs » affaires « , mais retournent au » ­moi-je « ensuite. Réaction très humaine ! ­Tous les avantages sans les inconvénients !

Tous les arguments du mardi 2 décembre tournaient autour de scénarios catastrophiques. Peur de manquer d’eau, que le lac se vide, que la nappe phréatique se vide assez pour causer l’affaissement de la route 161 ( ? ? ?), que le bruit sera insoutenable, que la valeur des propriétés baissera. Des peurs en partie justifiées, mais toujours à un niveau hypothétique, rien de prouvé. Je n’ai pas les réponses, je ne connais pas l’avenir. J’ose croire que les » experts « ont évalué les risques en toute transparence et ont offert ou offriront des solutions ou des compensations adéquates. Grassement rémunérés, conscients de devoir préserver et leur crédibilité et leur réputation, j’imagine qu’ils sauront livrer un ouvrage esthétique et sécuritaire (courbes et fondations) capable de soutenir le passage répétitif de trains qui, il serait naïf de penser le contraire, seront toujours de plus en plus longs. Ne jamais ­sous-estimer le pouvoir de l’appât du gain ! ­Il est évident que l’intérêt général de nos trois communautés éprouvées avait cédé la place aux intérêts personnels. La peur omniprésente teintait tout le débat. Cette peur malveillante détruisait tout raisonnement ou argument logique. Aucun » expert « si crédible ­soit-il n’aurait pu l’atténuer. Toutes les avenues pour calmer le jeu disparaissaient sous les émotions, lesquelles sont toujours mauvaises conseillères. Quelqu’un m’a interpellé pour me dire que si l’argent avait été au ­rendez-vous… ­peut-être qu’on en serait pas là… ?

Pour ma part, je me rangerai du côté de la décision finale, bonne ou mauvaise (selon les attentes) pour qu’enfin on arrête de s’­entre-déchirer. À un moment donné, durant ces 12 ans, j’avais nourri l’espoir que nous aurions pu nous faire confiance les uns les autres pour reconstruire un avenir collectif meilleur. Je l’avoue. Il m’arrive d’être un romantique. Depuis la tragédie, le discours bien orchestré et très médiatisé des » bons contre « laisse penser que seules les municipalités limitrophes sont pénalisées et que la ville est la vilaine méchante ( même si elle porte presque tout le fardeau de la douleur et le devoir de se reconstruire ).

Frontenac, ­Nantes et ­Lac-Mégantic sont à un carrefour important. Dans 20 ans, je ne serai plus là pour constater si nous avons manqué ce ­rendez-vous avec l’histoire. Pourtant, nous le devons à nos disparus, mais surtout à nos et vos enfants. Je pourrai au moins dire que j’étais parmi les peu nombreux qui se sont levés envers et parfois contre tous pour soutenir un projet (quoiqu’imparfait sans doute) qui me paraissait le meilleur pour panser nos plaies et offrir un avenir meilleur et sécuritaire aux générations futures. J’aurai été fidèle à mes convictions et à ma vision d’une communauté qui tarde à devenir rassembleuse. Nous sommes ­TOUS des ­MÉGANTICOIS qu’on le veuille ou non…

­André C. Tanguay, simple citoyen

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