Cégep Beauce Appalaches

Référendum 1995 : je me souviens !

Il y a 30 ans, le 30 octobre 1995, se tenait le deuxième référendum de l’histoire du ­Québec sur le projet de souveraineté porté par le ­Parti québécois au pouvoir. Celles et ceux appartenant à ma génération de « boomers » et à la génération qui nous a précédés ont eu le privilège de vivre le premier référendum, historique, du 20 mai 1980. J’avais alors 27 ans. J’étais journaliste au ­Confident de la rive nord à ­La ­Malbaie, depuis sept ans. Je me souviens de l’atmosphère qui régnait à cette époque, dans une circonscription libérale. Élu premier ministre en 1976, ­René ­Lévesque avait pris son temps avant d’appeler les ­Québécois et les ­Québécoises à un premier référendum sur le projet d’un ­Québec pays.

Comme ici, les élites politiques locales étaient majoritairement libérales ­là-bas. Le reste du ­Canada voyait en ­Lévesque et en son projet de souveraineté une menace existentielle. L’avenir paraissait enthousiasmant pour les jeunes de ma génération. Un peu moins pour celle de nos parents et de nos ­grands-parents. Mais les espoirs étaient grands pour un référendum gagnant.

Les « ­Oui » rêvaient à un pays, les « ­Non » espéraient davantage que le statu quo, un « nouveau ­Canada ». René ­Lévesque ne souhaitait pas une séparation drastique, comme l’accusaient ses détracteurs. Le texte de la question référendaire ne pouvait être mieux posée pour ce premier ­rendez-vous d’un peuple en marche vers son destin. On reprochera par la suite à la question référendaire d’avoir été trop longue. À vous de juger : « ­Le gouvernement du ­Québec a fait connaître sa proposition d’en arriver, avec le reste du ­Canada, à une nouvelle entente fondée sur le principe de l’égalité des peuples. Cette entente permettrait au ­Québec d’acquérir le pouvoir exclusif de faire ses lois, de percevoir ses impôts et d’établir ses relations extérieures, ce qu’est la souveraineté et, en même temps, de maintenir avec le ­Canada une association économique comportant l’utilisation de la même monnaie ; aucun changement de statut politique résultant de ces négociations ne sera réalisé sans l’accord de la population lors d’un autre référendum ; en conséquence, ­accordez-vous au gouvernement du ­Québec le mandat de négocier l’entente proposée entre le ­Québec et le ­Canada ? »

Le projet de ­souveraineté-association avec le ­Canada prôné par ­René ­Lévesque passait par une première étape : demander à la population québécoise, par voie de référendum, le mandat de négocier la souveraineté du ­Québec avec ­Ottawa. « ­Lévesque va payer cher son référendum », prédisait le député libéral ­Raymond ­Mailloux. Les tambours résonnent.

Résultats annoncés le soir du 20 mai : ­Pour l’ensemble du ­Québec, le « oui » obtient 40,5 % et le « non » 59,5 %.

J’ai joint L’Écho de ­Frontenac en août 1981. Plus de 15 ans de débats constitutionnels après le référendum de 1980 aboutissent à un autre événement majeur de l’histoire contemporaine du ­Québec. Le gouvernement péquiste de ­Jacques ­Parizeau, porté au pouvoir en septembre 1994, lance une nouvelle proposition à l’ensemble des ­Québécois et ­Québécoises. Juste avant ­Noël 1994, chaque citoyen reçoit, dans sa boîte aux lettres, sa copie de l’­avant-projet de loi sur la souveraineté du ­Québec. Le premier ministre appelle le peuple à ses devoirs et souligne l’importance de bien en saisir l’enjeu.

Comme en 1980, les camps du « oui » et du « non » se forment. Celui du « non » fonde ses espoirs sur un sondage démontrant que la population québécoise est toujours aussi divisée qu’en 1980 : ­60-40 contre l’indépendance du ­Québec et ­54-46 contre l’­avant-projet de loi sur la souveraineté du ­Québec. En ­France, le quotidien ­Le ­Monde n’hésite pas à qualifier ironiquement les ­Québécois de « branleux ».

Budget total annoncé pour la consultation populaire sur l’­avant-projet de loi sur la souveraineté du ­Québec : plus ou moins 55 M$. Les tenants de l’option fédéraliste boycottent les commissions régionales et appellent massivement les tenants du « non » à l’abstention. Un mot d’ordre suivi fidèlement par les élus locaux. Prétexte : ils ne se mêlent pas de politique nationale ! ­La population de la ­MRC du ­Granit a finalement bénéficié d’environ six heures et demie pour s’exprimer sur sa perception de l’avenir du ­Québec devant la ­Commission régionale de l’Estrie et sa présidente ­Lynn ­Charpentier, installée au ­Centre ­Mgr-Bonin. Une leçon à retenir de cet exercice méganticois : « ­Ce ne sont pas les notables ni les élus qui ont le plus de choses à dire. Ce sont les citoyens, les payeurs de taxes, ceux et celles dont on veut hypothéquer l’avenir, peu importe qu’ils demeurent dans ce pays ou qu’ils s’en donnent un autre. » ( ­Extrait de ­Quand le peuple habituellement silencieux s’exprime haut et fort - Édition du 19 février 1995) ­Un consensus estrien autour du projet de société soulevé lors de la consultation publique par les intervenants anglophones, défavorables à la souveraineté : le statu quo n’est plus acceptable ! ­Dans le rapport de la ­Commission, la présidente ­Lynn ­Charpentier brisera l’unanimité des 16 commissaires sur un point : elle n’endosse pas l’avis des commissaires à l’effet qu’aucune entente constitutionnelle concernant les demandes traditionnelles du ­Québec n’est possible dans le cadre du régime fédéral actuel.

La question posée sera courte et claire : « ­Acceptez-vous que le ­Québec devienne souverain, après avoir offert formellement au ­Canada un nouveau partenariat économique et politique, dans le cadre du projet de loi sur l’avenir du ­Québec et de l’entente signée le 12 juin 1995 ? »

L’enjeu de 1980 n’a pas tellement changé. Il repose essentiellement sur la capacité du ­Québec à devenir autre chose qu’une province canadienne parmi d’autres, sans caractère distinct ni la moindre forme d’accommodation particulière. Les premiers ministres des autres provinces réaffirment leur intention de ne pas négocier quoique ce soit avec le gouvernement de ­Jacques ­Parizeau et ferment la porte à toutes formes de négociations ou de partenariat. L’unité canadienne repose sur cette argumentation « non négociable » que ­Jean ­Chrétien ­lui-même défend avec autant d’ardeur à ce ­moment-là qu’à l’époque où il combattait aux côtés de ­Pierre-Elliot ­Trudeau contre l’option souverainiste de ­René ­Lévesque. Sa position, comme celle des provinces, ne s’est pas assouplie, loin de là.

Je notais : « ­Quand donc ­reconnaîtra-t-on la capacité des électeurs du ­Québec à déchiffrer le véritable enjeu derrière ce référendum ? ­Combien de décennies ou de générations devront s’écouler avant de passer le grand examen constitutionnel ? ­Rien ne semble avoir changé dans le camp du » ­Non « : certains grands personnages publics, à ­Ottawa et à ­Québec, ont cultivé la peur, la désinformation et l’insulte à l’intelligence des ­Québécois et des ­Québécoises. »

Sur les 5 087 009 électeurs inscrits, 4 757 509 iront aux urnes, pour un taux de participation de 93,52 %. Votes nuls : 86 501. Votes exprimés : 4 671 008.

Résultats : ­OUI : 49,42 % ­NON : 50,58 %. Proposition rejetée par une faible marge de 1,16 % ! ­Encore une fois déception et découragement dans un camp, victoire plus tempérée dans l’autre puisque, dès lors, il incombe aux fédéralistes canadiens de démontrer leur intérêt à abandonner le statu quo et à s’ouvrir sur un nouveau contrat avec le peuple québécois. Question pour vous : où en ­sommes-nous 30 ans plus tard ?

Rémi ­Tremblay
Lac-Mégantic

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