Rémy Lanlancette, coordonnateur pour le RLS du Granit, et de Dr Stéphane Tremblay, PDG du CIUSSS de l’Estrie-CHUS.
Attirer la main-d’œuvre oui, mais surtout la retenir. Développer de nouvelles façons de faire pour compenser l’écart entre la hausse grandissante des besoins et la réalité du marché du travail. De passage à Lac-Mégantic dans le cadre d’une tournée régionale, le président-directeur général du CIUSSS de l’Estrie CHUS, le Dr Stéphane Tremblay, s’est dit très conscient des défis à relever, soulignant au passage des «scénarios améliorés», développés à l’intérieur même du Réseau local de services (RLS) du Granit.
«Dans l’ensemble du réseau, on a plus d’employés qu’il y a huit ans mais les besoins ont progressé beaucoup. On vit encore avec les conséquences de la pandémie. L’effet d’isolement a laissé ses marques; les problématiques de santé mentale sont plus présentes ou les gens en sont plus conscients. Des listes d’attente se sont créées en chirurgie et pour voir un médecin spécialiste», partage M. Tremblay.
Conscient que ces lacunes ne pourront être solutionnées dans six mois, il soulève quelques bons coups réalisés sur le territoire du Granit, dont la modulation des horaires des soins intensifs et du bloc opératoire, permettant d’éviter la fermeture totale de ces services cet été. Un scénario développé à l’interne, explique Rémy Lalancette, coordonnateur de la coordination opérationnelle locale. «Au départ, la commande d’en haut c’était de fermer pendant 16 semaines. On s’est attachés avec le bloc opératoire, qui a augmenté les vacances de ses employés pour les accorder en juillet et août. On a diminué aussi les soins intensifs pour donner plus de vacances aux employés.»
Créé en décembre dernier, le poste de M. Lalancette a son équivalent dans quatre autres MRC sur les neuf que compte de CIUSSS de l’Estrie. «Souvent, lorsqu’on manque de main-d’oeuvre, la solution c’est de se mettre à la recherche d’employés. Ce qui était possible il y a plusieurs années car il y avait un bassin de main-d’œuvre disponible. On doit maintenant envisager d’autres alternatives, comme une réorganisation des services, tout en évitant le temps supplémentaire obligatoire», commente Stéphane Tremblay, signifiant que le RLS du Granit est le plus avancé en termes de nouvelles façons de faire.
«Mon rôle est d’amener une cohésion à l’intérieur même du RLS, avec tous les chefs de services, d’avoir une agilité afin de prendre les décisions rapidement avec l’équipe. On s’assure aussi d’avoir le pouls des employés avant de monter une décision plus haut», explique M. Lalancette, qui relève directement du Dr Tremblay. «À date, ce système fonctionne très bien mais je ne suis pas seul, j’ai une équipe, dont la Dre Catherine Dulac à titre de cogestionnaire médicale. C’est important d’avoir la coopération des médecins», précise le coordonnateur.
Il y a quand même lieu d’attirer de la main-d’œuvre sur le territoire granitois. À ce titre, M. Tremblay souligne le dynamisme de la région en ce qui a trait aux programmes de formation. Il soulève toutefois que le centre hospitalier de Lac-Mégantic n’offre pas le même éventail de choix qu’un plus grand hôpital, notamment en soins infirmiers. «Il faut respecter les intérêts de chacun mais si on est capable d’en attirer un certain nombre, c’est bien parce qu’ils deviennent des ambassadeurs.»
Se rapprocher des communautés
Une journée d’embauche organisée le 13 avril dernier a permis de procéder au recrutement d’une vingtaine d’employés. Toutefois, certains ont dénoncé de manque de transparence à l’endroit des personnes dont la candidature n’a pas été retenue, ces derniers n’ayant pu connaître les raisons de ce rejet. Stéphane Tremblay s’est dit très conscient de cette situation. «Ce n’est pas acceptable. Aujourd’hui, ce n’est pas le CIUSSS de l’Estrie CHUS qui choisit ses employés, c’est l’inverse. Pour que les gens nous choisissent, il faut qu’on soit à la bonne place, de la bonne façon au bon moment. Je ne suis pas prêt à vous dire quel va être le prochain pas, même s’il est clair dans ma tête. Mais ce sera certainement un pas pour qu’on tente de se rapprocher des communautés. Je n’irai pas plus loin», a-t-il transmis en entrevue à l’Écho, peu avant d’animer une assemblée citoyenne, le soir du 20 juin au CSM.
La rétention de la main-d’œuvre est un enjeu encore plus important que son attraction. «On a mis en place de nouvelles pratiques d’accueil pour les nouveaux employés. Ils ne débutent jamais la fin de semaine et on s’assure que leur chef de service soit sur place afin qu’ils soient bien orientés. On souhaite aussi éviter qu’ils arrivent au sein d’une équipe déjà en surcharge, mentionne Rémy Lalancette, soulevant que la pénurie de logements sur le territoire a tout de même un impact important sur la rétention.
Au chapitre de la prestation de services, Stéphane Tremblay évoque l’apport de partenaires, notamment auprès des aînés. «Il faut consolider et augmenter le soutien à domicile. Penser à intégrer des organismes communautaires, en tout respect de ce qu’ils peuvent faire. L’enjeu sur le territoire du Granit c’est que les distances sont grandes, ce qui apporte son lot de défis quotidiens. Il faut s’adapter à ça, en terme d’organisation du travail et en réponse aux besoins des personnes âgées.»
En allant directement à la rencontre avec les citoyens pour répondre leurs questions, le PDG du CIUSSS de l’Estrie a pu échanger sur une variété de sujets mais une constante demeure: le système est compliqué et plusieurs peinent à obtenir des services. «Je sais que je ne donne pas la réponse que les gens voudraient avoir; ça fait partie de l’échange d’être honnête. Cette tournée en est une d’information et d’éducation de part et d’autre. Ça me fait réfléchir autrement.»
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