Justin Laramée a rendu un vibrant hommage aux producteurs laitiers. (Photo Stéphane Bourgeois)
Imposante industrie que celle du lait, qui génère 27% des recettes agricoles de la province. Sans compter que le Québec fournit près de 40% de la production laitière au pays. Mais la réduction du nombre de fermes laitières québécoises est tout aussi imposante. En 1980, année de naissance de l’auteur de Run de lait, Justin Laramée, on en comptait 21 982. Lorsqu’il a créé son documentaire théâtral, il n’en restait que 4766. Des chiffres qui parlent mais ne disent pas tout. Fruit d’une imposante recherche, Run de lait se révèle une profonde expérience humaine.
L’angle du théâtre documentaire ne pouvait être plus à propos pour transmettre l’abondance d’informations de Run de lait, présenté le 25 janvier à la Salle Montignac, devant un auditoire comprenant plusieurs producteurs de la région. À la fois auteur, acteur, co-metteur en scène et producteur de Run de lait, Justin Laramée a rendu un vibrant hommage à ces champions du multitâche.
Pourquoi y a-t-il tant de détresse psychologique chez les producteurs laitiers? Prémisse de départ de la quête de Justin Laramée, puis rencontres successives avec différents experts mais aussi petits et gros producteurs, politiciens… cherchant en quelque sorte, à pointer du doigt un responsable, «un méchant».
Dans une mise en scène dynamique, Justin Laramée rend accessibles des réalités comme la gestion de l’offre, le lait diafiltré, le secteur de la transformation... On y comprend que rien n’est noir ou blanc, que le bucolique et l’impitoyable loi du marché peuvent coexister. Que ces humains qui lui ont ouvert leur porte, leur étable, leur bureau et leur usine ont tous contribué à fertiliser sa création. Qu’on a également notre rôle à jouer comme consommateur. Run de lait relate aussi 8000 ans d’une histoire somme toute méconnue.
Sur la scène, plusieurs haut-parleurs, d’où sortent successivement les extraits des entretiens menés par Justin Laramée durant cinq années. Processus où il inclut sa conjointe et ses deux enfants, témoins de ses doutes et questionnements.
Aux côtés de Justin Laramée, le concepteur sonore et interprète Benoit Côté, lui-même fils de producteurs, expose la réalité sur le terrain, poussant la réflexion au-delà de la vision plus urbaine de l’auteur. «Notre but, c’est de diminuer le fossé entre la ville et les régions. Avant, tout le monde connaissait quelqu’un qui travaillait sur une ferme. De mon côté, à Montréal, personne ne connait quelqu’un qui est sur une ferme. Ça rend les producteurs plus craintifs envers des urbains comme moi. Ça a pris du temps mais, d’un producteur à l’autre, la confiance s’est établie. Qu’un gars de la ville parle avec empathie de ce que font les producteurs, ça rapproche ces deux mondes», a transmis l’auteur lors d’une rencontre avec le public après la pièce.
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