L’avenir pourrait passer par l’énergie éolienne

Le gisement qui pourrait rendre les Granitois plus riches ne se trouve pas sous terre ni à la surface. Il souffle sur leurs têtes. Le projet d’un parc éolien d’une capacité de 80 mégawatts à Saint-Robert Bellarmin, que pilote le consortium Saint-Laurent Énergies, est tout près de prendre racine dans le paysage des montagnes frontalières. Une étape déterminante a été franchie en janvier, quand la Régie de l’énergie a donné son aval au projet d’aménager 40 éoliennes prêtes à tourner dès l’été 2012. Un chantier qui exigera des investissements de l’ordre de 200 millions de dollars et qui laisse entrevoir des retombées potentielles d’environ 25 millions $.

Le promoteur prévoyait réaliser son projet à Aguanish, sur la Côte-Nord, pour ainsi pouvoir livrer les mégawatts d’électricité qu’elle avait obtenue au terme d’un appel d’offres lancé en 2005 par Hydro-Québec. À l’époque, le consortium avait raflé près de la moitié des 2000 mégawatts disponibles. N’ayant pas réussi à s’entendre avec la MRC de Minganie sur la localisation des éoliennes, et dans la perspective de ne pouvoir remplir la commande à la date prévue, ce qui lui aurait valu des pénalités, Saint-Laurent Énergies s’était montré intéressé par le potentiel de Saint-Robert-Bellarmin. Un site que voulait exploiter, à l’origine, le groupe Trans-Canada dont le projet n’avait pas été retenu.

«Des représentants de Saint-Laurent Énergies sont venus rencontrer la direction de la MRC pour vérifier l’accueil qu’elle ferait à son projet d’un déménagement du projet. Ils savaient qu’il existe un bon gisement éolien à Saint-Robert», raconte André Piette, le commissaire à l’agriculture et aux ressources naturelles au Centre local de développement (CLD) de la MRC du Granit.

Même si, dans les faits, les 40 éoliennes de Saint-Laurent Énergies seront peu visibles du commun des mortels, le paysage économique de la MRC pourrait être appelé à changer. Et c’est là, la bonne nouvelle. «Les éoliennes elles-mêmes représentent 70% du coût du projet. Pour le reste, ce sont des retombées économiques directes pour lesquelles notre région sera bien placée pour bénéficier, en terme de main-d’œuvre pour l’abattage des arbres, la construction de chemins, de ponts, l’excavation, etc.»

La seule base de béton où repose chaque éolienne peut nécessiter jusqu’à 50 voyages de bétonnière. Dans un coin de pays situé à mi-chemin entre Lac-Mégantic et Saint-Georges de Beauce, qui pourra remplir la commande? Une entreprise seule ou un consortium?

Selon André Piette, en sa période la plus achalandée le chantier emploiera de 150 à 200 travailleurs. Des gens qu’il faudra loger, nourrir et divertir. Tout un défi, puisque la municipalité de Saint-Robert Bellarmin ne dispose pas d’une telle infrastructure d’accueil. Par contre, si éloigné soit-il, le village présente le meilleur atout qui soit pour le développement éolien, les vents! À ce point de vue, sur la carte des vents, Saint-Robert est bien pourvu, insiste le commissaire André Piette.
«Ailleurs, ce genre de chantier a pu se réaliser en deux étés, le premier, tu déboises et prépare le terrain, et le deuxième, tu installes les éoliennes.»

Le parc serait aménagé sur des terres publiques et celles appartenant à la compagnie Domtar. Donc, Québec et Domtar empocheraient des redevances eux aussi, alors que la municipalité de Saint-Robert-Bellarmin recevrait 200 000$ en redevances pour chaque année d’exploitation des éoliennes. Sans avoir à investir un sou.

Le personnel du CLD a reçu un mandat clair des élus: maximiser les retombées du projet dans la MRC, sachant que du côté de la Beauce, là aussi, on voudra atteindre les mêmes objectifs.

Et pourquoi pas deux parcs?
Parallèlement au déménagement du projet de Saint-Laurent Énergies, dans le cadre de l’appel d’offres de 2000 mégawatts, un nouvel appel d’Hydro-Québec est actuellement en cours, celui que la société d’état qualifie d’appel d’offres communautaires et qui vise à donner aux municipalités la possibilité d’investir dans le développement de l’éolien.

Flairant la bonne affaire, le conseil des maires de la MRC du Granit a donné son accord à ce que soit évalué l’intérêt à ce que la MRC devienne co-actionnaire d’une nouvelle entreprise éolienne qui proposerait, celle-là, l’installation de 12 autres éoliennes sur le même terrain de Saint-Robert Bellarmin, en partenariat avec le consortium Saint-Laurent Énergies. «Ce que les maires doivent décider d’ici la mi-mai, c’est l’intérêt au niveau financier d’investir dans l’éolien, cette fois avec des dividendes plutôt que des redevances à soutirer de l’exploitation du projet.»

L’aventure économique dans laquelle les élus sont appelés à participer va cependant nécessiter des investissements publics qui peuvent se compter en millions de dollars.

«C’est une opportunité pour les municipalités de s’assurer des revenus supplémentaires », convient André Piette, rappelant que le diagnostic manufacturier réalisé en 2005 portait une vision d’avenir, en mentionnant entre autres, comme secteur à envisager, celui des énergies renouvelables. «Il y a actuellement cohérence dans ce qui se passe aujourd’hui et les recommandations des auteurs de l’étude qui avaient convenu que la région disposait d’atouts dans ce domaine.»

Le projet communautaire se veut d’autant plus intéressant que ses 12 éoliennes, d’une capacité totale de 24 mégawatts, s’ajouteraient au parc des 40 autres de Saint-Laurent Énergies, cette dernière compagnie disposant de tout le savoir-faire. «Saint-Laurent Énergies nous a remis une proposition de partenariat et nous avons mandaté la firme Raymond Chabot Grant Thornton pour en analyser les implications financières. C’est elle qui va nous donner un aperçu de la rentabilité potentielle de ce projet-là.»