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Rouler sur du rêve
L’idée n’est pas nouvelle. Cela fait des lunes que le projet d’une autoroute est-ouest entre Sherbrooke et les provinces atlantiques, qui traverserait notre région par le petit poste frontière de Woburn-Coburn Gore, flotte dans l’air. Probable que les troupes de Benedict Arnold n’auraient pas essuyé un tel échec en 1775 si la «trail» avait eu quatre voies de large. Mais bon, on ne refera pas l’histoire. Le Bas Canada n’a pas été libéré des Britanniques par les Américains et il s’en est remis.
Donc, la fameuse autoroute du futur n’est pas une vague légende. Et tant mieux si ce sont les Américains eux-mêmes, les hommes d’affaires et les industriels, qui jugent le projet tellement intéressant pour le développement du nord du Maine, qu’ils sont prêts à investir de leurs poches 2 milliards de dollars pour étendre l’asphalte en plein cœur de la forêt, sur quelque 260 kilomètres entre Calais et Coburn Gore. En autant que les gouvernements du Nouveau-Brunswick et du Québec, de leur côté, prennent la responsabilité de lier la future autoroute jusqu’à Saint-Jean, le terminal de l’Est, et Sherbrooke, celui de l’Ouest.
Les promoteurs ont raison d’argumenter que ce qui est bon pour le trafic ferroviaire de marchandises sur cet axe est-ouest peut l’être aussi pour le trafic routier, marchandises et voyageurs.
Pendant près d’un siècle, le Canadien Pacifique a assuré la liaison Sherbrooke-Saint-Jean par cette ligne presque droite du nord du Maine, avant de s’en désintéresser au profit de l’axe nord-sud, reliant le centre du pays aux ports américains de la côte atlantique. La compagnie ferroviaire Montreal Maine & Atlantic a finalement pris le relais quelques années plus tard. La preuve que la ligne droite demeure encore la meilleure solution pour passer du point A au point B, comme vous le dictera votre GPS.
Un rêve de fou? Si on pense que la voie de contournement de la 161 tracée sur quelques kilomètres entre Nantes et Frontenac, derrière le parc industriel de Lac-Mégantic, a mis plus de dix ans à se réaliser au complet, on devine qu’un lien de quelque 462 kilomètres (St-Jean/Sherbrooke) à tracer à travers nulle part et un chapelet de villages ne se fera pas du jour au lendemain, même en supposant que les gouvernements du Québec, du Nouveau-Brunswick et du Maine s’entendent pour y donner le feu vert. En lui-même, le projet du consortium Cianbro et Berger, avec à sa tête Peter Vigue, se défend. Surtout que, dans sa portion américaine, aucun fond public sera réclamé. Que des fonds privés! C’est le principe même d’une autoroute à péage. Un corridor d’échanges commerciaux, sur lequel les promeneurs pourront s’aventurer en payant quelques dollars pour s’épargner plusieurs heures de route. Une économie de temps et d’essence. Les utilisateurs devraient assurer la rentabilité du projet après de très très nombreuses années.
Construire une autoroute à quatre voies entre Woburn et l’autoroute 10 sera une toute autre paire de manches. Après tout, on ne peut pas bousculer des communautés et déplacer des maisons sans crier gare. Ce sera tout un travail de relations publiques que de convaincre les municipalités locales, le long du trajet vers la jonction de la 10, d’y aller de compromis en compromis pour que ce projet tienne la route et voit le jour… un jour! Peut-être en partenariat public-privé ?
Les Méganticois et les gens du Nord du Maine ne font pas que partager une frontière et des arbres généalogiques communs. Des liens se tissent à plusieurs niveaux: histoire, économie liée à l’exploitation forestière, sécurité publique, tourisme. Sur une carte géographique, le Maine est comme le cul-de-sac des États-Unis et son territoire semble encastrer dans le Québec et le Nouveau-Brunswick. Une erreur topographique, semble-t-il, sans laquelle, ces vastes forêts au nord du 45e parallèle reviendraient au Canada. Il est alors normal qu’avec un passé quelque peu commun, on envisage aussi un commun avenir plus étroitement lié que par la petite mais ô combien charmante route de l’«Arnold Trail».
La discrétion est de mise
De ce côté-ci de la frontière, le projet de corridor est-ouest ne figure pas dans les promesses électorales ni dans les préoccupations du commun des mortels. Pourtant, ce que peu de gens savent c’est que des lobbyistes s’activent. Ils sont inscrits au registre et préparent le terrain discrètement, sans faire de vague. Ils n’ignorent pas les écueils qu’ils risquent de rencontrer, chez eux d’abord puis du côté canadien de la frontière.
Les commentaires publiés dans certains journaux du Maine ne manquent pas d’intérêt. On connaît tous les préjugés nourris par les Américains à l’endroit du Canada. Rien de différent sur la route qui nous conduit aux plages d’Old Orchard et d’Ogunquit. Au pays de l’Oncle Sam, les partisans du «no way», qui voient davantage les dommages à l’environnement que les bénéfices financiers pour leur développement à court, moyen et long termes, affrontent les autres, ceux qui disent «qu’avons-nous à perdre puisque ce sont les entrepreneurs qui fourniront l’argent pour l’autoroute qui nous amènera davantage de touristes, de plaisanciers et de motoneigistes qui dépenseront de l’argent chez nous, dans nos commerces?»
Au Nouveau-Brunswick, les populations se disent inquiètes. On craint la diminution de la circulation dans l’axe nord-ouest de la province et donc un danger pour l’économie régionale. Au Québec, qu’est-ce qu’on en pense? Rien, on ne savait même pas que le projet existait alors que le corridor devant mener jusqu’à Coburn Gore/Woburn figurait sur les plans déjà en 1999.
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