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Transports Canada écorché dans le rapport du BST
Au centre, Jean Laroche, administrateur en chef des opérations du Bureau de la sécurité des Transports.
Transports Canada savait que la compagnie de chemin de fer Montréal Maine & Atlantique avait certains problèmes à gérer le risque du transport des matières dangereuses sur ses rails. Il connaissait ses manquements répétés et sa «faible culture en sécurité», mais il n’y avait pas toujours de suivi exercé sur le transporteur. Pire encore, le gouvernement fédéral a failli dans son rôle d’assurer la sécurité du public. Dans son rapport d’enquête sur la tragédie de Lac-Mégantic, qu’il vient de rendre public mardi, le Bureau de la sécurité des transports évite de porter le blâme sur qui que ce soit, dans la chaine de facteurs qui ont mené à la catastrophe du 6 juillet 2013, mais pointe tout de même du doigt le manque de surveillance de l’organisme fédéral à l’égard des pratiques dans le transport ferroviaire.
«Pour les citoyens de Lac-Mégantic, notre rapport ne ramènera pas les êtres chers et ne reconstruira pas la ville. Nous le savons que trop bien. Mais nous pouvons tracer la voie vers un avenir meilleur. Un avenir plus sécuritaire. Un avenir où les trains qui traversent nos collectivités, et nos villes, ne sèment plus la peur.» Au terme d’une enquête qui aura duré treize mois et nécessité le déploiement d’importantes ressources, l’administrateur en chef des opérations au BST, Jean Laporte, conclut que ce sont une multitude de facteurs, 18 en tout, qui ont mené à l’accident qui a coûté la vie à 47 personnes, le 6 juillet 2013. Des problèmes «systémiques», qui auraient pu être décelés et réglés avant la tragédie. Mais, «les accidents ne sont jamais causés par une seule personne, un seul geste ou un seul facteur. Nous devons tenir compte de tout le contexte», a-t-il insisté au cours d’une conférence de presse qui a attiré autant de médias francophones qu’anglophones au Club de golf du lac Mégantic.
Rappel des faits et de la séquence des événements : au cours de la soirée du 5 juillet 2013, le train de la MMA a été garé sur une pente descendante sur la voie principale, à Nantes. Le mécanicien de locomotive a serré les freins à main des cinq locomotives et de deux autres wagons, et a arrêté toutes les locomotives sauf la locomotive de tête. «Les règles ferroviaires exigent que les freins à main soient capables, à eux seuls, de retenir un train, et il faut vérifier si tel est le cas à l’aide d’un essai. Ce soir-là, les freins à air de la locomotive sont demeurés serrés pendant l’essai, de sorte que le train était retenu par l’effort jumelé des freins à main et des freins à air», indique le BST.
Après qu’un incendie s’est déclaré dans le moteur, des intervenants d’urgence ont arrêté le moteur, ce qui a amené l’air à s’échapper des freins indépendants qui sont devenus inefficaces. Puisque l’effort de freinage des freins à main n’était pas suffisant, le train a commencé à descendre la pente vers Lac-Mégantic, prenant de la vitesse, atteignant 65 m/h. Le déraillement s’est produit à l’entrée du centre-ville, près de la rue Frontenac.
Le BST mentionne que, lorsqu’elle a apporté des changements opérationnels importants à l’échelle de son réseau, avec le transport en croissance des wagons DOT-111 remplis de pétrole brut, la MMA «n’a pas cerné ni géré rigoureusement les risques en vue de l’exploitation en toute sécurité.»
De son côté, Transports Canada n’a pas exercé une surveillance réglementaire adéquate pour s’assurer que les risques connexes étaient bien gérés. Des tapes sur les doigts des fonctionnaires du bureau de la région de Québec qui, ajoute-t-on n’ont pas assuré une surveillance réglementaire adéquate pour s’assurer que les risques connexes étaient bien gérés. «De sorte que des pratiques dangereuses se sont perpétuées.»
Deux nouvelles recommandations ont été émises par le BST, ce 19 août. Le BST recommande que le ministère des Transports exige que les compagnies ferroviaires canadiennes mettent en place des moyens de défense physiques additionnels pour empêcher le matériel de partir à la dérive, et que le Ministère effectue des vérifications des systèmes de gestion de la sécurité des compagnies ferroviaires assez poussées et assez fréquentes pour confirmer que les processus nécessaires sont efficaces et que des mesures correctives sont mises en œuvre pour améliorer la sécurité.
La nécessité d’un plan d’intervention d’urgence
Le risque qu’un accident comme celui de Lac-Mégantic se produise ailleurs au pays est-il réel? Oui, convient l’administrateur du BST. D’où l’urgence de mettre en place des mesures sévères pour éviter une répétition. «Il faudra que les gouvernements, les compagnies ferroviaires et les expéditeurs fassent tout en leur pouvoir afin de s’assurer qu’un tel accident ne se reproduise plus.»
Compte tenu de l’augmentation considérable des quantités de pétrole brut transportées par train au Canada, ainsi que de la possibilité qu’un important déversement puisse encore se produire, le BST a aussi recommandé au ministère des Transports qu’il exige des plans d’intervention d’urgence pour le transport de grandes quantités d’hydrocarbures liquides.
Interrogé à savoir si ces plans-là étaient déjà rédigés et appliqués, Jean Laporte s’est dit confiant que l’industrie ferroviaire se plie à l’exercice. «La Ministre a exigé que toutes les compagnies développent des plans d’urgence, qu’ils les soumettent à Transports Canada pour approbation dans un délai établi. Je n’en connais pas exactement tous les détails pour chaque compagnie ni où on en est aujourd’hui, mais c’est très avancé comme réponse», a lancé M. Laporte.
Ces plans d’intervention doivent contenir des informations sur les équipements, la formation du personnel, les matériaux qui sont nécessaires pour intervenir en cas d’urgence, afin de faciliter le travail des premiers intervenants.
«Les compagnies ferroviaires ont commencé à faire la formation avec les pompiers à travers le pays. Il y a déjà beaucoup de travail qui se fait à ce niveau», a-t-il ajouté.
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