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Le Carrefour Lac Megantic attend le signal des élus municipaux
Déjà 21 ans qu’il gère le Carrefour Lac Mégantic. Presque trois ans après le grand bouleversement de juillet 2013 qui a érigé un mur entre le pôle commercial «étiré» du centre-ville et la plus grande place d’affaires au niveau du commerce de détail, André Quirion ne jette pas la serviette. Le changement de garde à l’hôtel de ville a soufflé un vent d’optimisme. «Oui, je pense aujourd’hui que le dialogue est possible», lance-t-il, refusant de mettre au panier le plan d’agrandissement qu’il avait fait préparer avant qu’on commence à lui mettre des bâtons dans les roues et qu’il se sente mis à l’écart du développement.
Les mains liés par différents règlements d’urbanisme rédigés au lendemain de la catastrophe pour privilégier la relance du centre-ville dévasté, celui qui est aujourd’hui copropriétaire du centre commercial, avec deux autres partenaires financiers, n’attend plus que le signal pour se remettre à la tâche et préparer une deuxième version de son projet. Quand la tragédie s’est produite, il n’attendait plus que le permis de construction délivré par la municipalité pour amorcer le chantier.
L’ancienne administration lui a laissé un goût amer, au point de se sentir lui-même persona non grata dans cette ville où il avait pourtant jadis présidé la corporation Rues principales et participé à l’élaboration d’une vision commune des pôles commerciaux pour rendre le magasinage en ville le plus attrayant.
Lac-Mégantic, il y croit toujours. «C’est très rare les emplacements au Québec qui offrent des beaux lieux de villégiature comme ici. Avec une telle proximité du lac. Mais, si l’on veut rester une destination commerciale intéressante pour notre clientèle, contrer les offres périphériques et le magasinage en ligne qui gagne en popularité, on ne peut pas se permettre d’être divisés. Le Carrefour ne peut pas travailler en vase clos, le centre-ville ne peut pas travailler en vase clos, pas plus que l’autre pôle commercial créé de l’autre bord de la rivière, non plus.»
Pour assurer une qualité de vie intéressante pour les nombreux propriétaires et employés de commerces, une diversité de la trame commerciale et répondre aux besoins des consommateurs, les pôles commerciaux n’ont pas le choix de travailler ensemble.
«Ici, au Carrefour, la majorité de notre clientèle provient de l’extérieur de la ville. C’est une constante qui n’a pas changé. Notre job, c’est de continuer d’être un attracteur régional.»
Depuis deux ans, le Carrefour a eu la vie dure. La baisse de population à Lac-Mégantic se fait sentir. La boutique Revue a fermé son local suite à une restructuration de la chaine qui a éliminé 24 magasins à travers le Québec. «On a un projet pour cet emplacement-là», rassure André Quirion. Quand le seul médecin qui avait son cabinet à l’intérieur du centre commercial a pris sa retraite, l’été dernier, le droit acquis est tombé. «Un règlement municipal m’empêche aujourd’hui de fournir un service à cette clientèle.» Le dr Marc-René Nogue comptait plus de 3500 patients qu’il recevait à son bureau, au cœur du centre commercial, en face de l’hôpital.
«Dans la façon de développer la trame commerciale, qui se soucie du consommateur et du citoyen?», questionne le gestionnaire. Il ose croire pourtant que les propriétaires de commerces ont encore leur mot à dire, autant sinon davantage que les urbanistes. «Il y a un principe de base qu’on ne peut pas changer dans le magasinage, un peu comme la loi de la gravité, c’est la proximité des commerces. C’est attrayant si tout est proche et facile. Comme consommateur, pourquoi j’irais magasiner au Carrefour, par exemple? Pourquoi je ne me ramasserais pas sur le Plateau, à Sherbrooke. Tout est là ! On a rempli la mini van, on a pris les commandes pour les amis et de retour, on se tape un bon souper. Pourquoi on ne serait pas une destination aussi intéressante?»
Certaines décisions des deux dernières années seront difficiles à réparer. L’éloignement des pôles et l’étirement de l’offre commerciale en sont de bons exemples. «Si j’ai un pôle commercial très diversifié, que j’en mets un autre ici, un autre là, de l’autre côté de la rivière, est-ce que c’est intéressant pour le consommateur de prendre le temps de faire le tour et d’utiliser l’auto à chaque fois?»
Il aimerait bien mettre le récent passé de côté et passer outre à l’amnésie qui semble s’être développée avec la tragédie. «Travaillons notre mix commercial de façon cohérente. Faisons en sorte qu’il y ait de bonnes nouvelles à donner. Je suis optimiste, mais je ne me sens pas poussé du tout dans le dos. On veut rencontrer les gens de la municipalité, savoir c’est quoi leur intérêt. Oui, les gens sont conscients qu’il y a une vie à l’extérieur du centre-ville et que tous les secteurs doivent être viables. J’entrevois une possibilité de dialogue. J’ai rencontré la conseillère du quartier, Julie Morin. Elle fait partie du nouveau dynamisme, de cette nouvelle génération de gens qui veulent bâtir. De ceux qui comprennent que si tout le monde part magasiner à Sherbrooke, ça va être plus dur pour moi et les propriétaires de commerces de payer leurs taxes, et plus dur d’avoir un pouvoir d’achat pour offrir de bons prix aux consommateurs.»
Quel leader peut envoyer un signal clair aux André Quirion de ce monde? «Le maire», répond avec assurance celui qui se sent prêt à engager le Carrefour Lac Mégantic dans une nouvelle étape de son développement.
André Quirion se dit prêt à sortir et dépoussiérer son projet d’agrandissement, dès qu’on lui enverra le signal depuis l’hôtel de ville.
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