Oscar Brochu

Confort et indifférence

Le durcissement de ton du gouvernement de Jean Charest à l’endroit des étudiants depuis la démission de Line Beauchamp et le retour de Michelle Courchesne à l’Éducation, lundi, n’augure rien de bon pour la suite des choses. Le premier ministre, qui est aussi ministre responsable de la Jeunesse, rappelons-le lui, a annoncé qu’il ne ferait plus aucun compromis. En d’autres termes, qu’il ne cèderait pas un pouce de terrain.

À la dérive, le gouvernement libéral majoritaire n’a presque plus de marge de manœuvre. Un autre départ dans ses rangs et le gouvernement pourrait tomber. Mathématiquement, on s’entend, parce que les partis d’opposition et les députés indépendants n’ont pas l’air d’avoir la même lecture du fossé qui s’élargit entre ceux qui détiennent le pouvoir et ceux qui le contestent, de la manière qu’ils l’exercent à coups d’injonctions, de matraque et de gaz lacrymogène.

La crise étudiante s’est vite transformée en crise sociale et plus le temps passe, plus il sera difficile pour ce gouvernement de ramener le calme, après le chaos qu’il a encouragé par son inaction. Parce que, depuis le début, un moratoire aurait rapidement permis de mettre le couvercle sur la marmite. En laissant faire et en opposant la force aux manifestants, la judiciarisation au dialogue, Jean Charest récolte ce qu’il sème. Un leadership politique affaibli et peu d’espoir d’un retour à l’école sans qu’une partie ou l’autre perde la face. Et personne, d’un côté comme de l’autre, ne voudra reculer d’un pas.

Qui aurait cru qu’Amnistie internationale détourne son regard des champs de bataille de la planète pour jeter un œil inquiet sur l’usage de la force lors de manifestations étudiantes qui s’annonçaient pacifiques. Mettre toute cette dérive sur le compte d’une poignée de casseurs dépasse l’entendement. Ce que les médias sociaux véhiculent comme images depuis des mois déjà expriment le chaos. Du cinéma vérité qui a vite fait de se retrouver sur les ordinateurs du monde entier, sans avoir eu besoin de passer par Cannes ou Hollywood. Des jeunes et même des moins jeunes qui se font gazer, matraquer, charger, piéger, emprisonner, avec le niveau de violence qu’on s’est habitués à voir en direct l’an dernier lors des différents mouvements Occupy.

Le printemps québécois ressemble de plus en plus à un show de boucane. Une tempête propulsée par un vent de mécontentement populaire qui grandit. La majorité silencieuse n’est pas pour autant aveugle. Et ce qu’elle voit est loin d’être rose !

Lors de son passage à Lac-Mégantic, une semaine avant sa nomination à l’Éducation, la présidente du Conseil du Trésor, Michelle Courchesne, avouait du bout des lèvres que son gouvernement ne maîtrisait pas très bien les médias sociaux. Et c’est par le canal des médias sociaux que l’«écoeurantite» aigue se propage à la vitesse supérieure. C’est par les médias sociaux que des illustres inconnus s’expriment et se transforment souvent malgré eux en des leaders d’opinion. Ces dernières semaines, on pourrait croire que tout a été écrit sur la crise sociale actuelle. Les pour comme les contre se sont exprimés. Le message qui m’a le plus interpelé n’est pas celui d’un Gabriel Nadeau-Dubois ni d’un Léo Bureau-Blouin, non, il vient d’un major des Forces canadiennes à la retraite, qui a presque quatre fois leur âge et un million de fois leur expérience de vie. Qu’est-ce qu’il disait le militaire, avec ses sept médailles d’honneur accrochées sur le devant de son uniforme, alors qu’il s’adressait à des étudiants à Saint-Jean-sur-Richelieu? «Il n’y a pas grand changement dans un pays sans que la jeunesse embarque… Le seul endroit dans la société où l’on est solidaire c’est quand on est jeune!» La hausse de 1625$ de frais de scolarité en cinq ans ne passe tout simplement pas. Surtout que cet argent supplémentaire, comme disait le militaire, servait à «compenser pour les erreurs faites par les générations d’avant!» Celles qui ont eu tout cuit dans le bec. Le tiers de nos impôts sert déjà à ça, le financement des excès du passé. Ce qui fait, en bout de ligne, qu’un jeune étudiant qui sort des hautes études à 30 ans va devoir dans les dettes jusqu’au cou pendant vingt autres années!

On est rendus bien loin du discours de la lutte au décrochage scolaire quand les images à la télé ou sur l’ordi mériteraient un avertissement du genre: allez coucher les enfants! Allez dire à un élève du primaire qu’il doit nourrir l’ambition d’aller au cégep et à l’université quand il aperçoit sur toutes les télés les drôles de messieurs habillés en G.I. Joe aux portes des écoles. L’éducation à coups de matraque, pas vendeur comme projet d’avenir. Surtout que ses futurs profs sont aussi partie prenante des confrontations, leurs cheveux gris les distinguant du reste de la masse grouillante qui se dresse devant l’autorité.
Le Québec change. Ce qui ne doit pas être vu comme une menace à la population vieillissante. M’est d’avis que les jeunes, une fois au pouvoir, vont avoir plus de respect pour les vieux, dont je suis presque, que nos gouvernants actuels. Et dîtes-vous que vous prendriez la rue, en marchette ou en souliers de jogging, si du jour au lendemain le gouvernement annoncerait une baisse de 1625$ de votre chèque de pension étalée sur cinq ans. Ils auraient beau essayer de vous faire accroire qu’un petit 50 cennes par jour c’est pas la mer à boire, vous l’avaleriez de travers à petites gorgées.

Le confort et l’indifférence ne vous mettent pas à l’abri des décisions gouvernementales qui se prennent dans votre dos.

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