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Notre monde a changé
Vendredi 19 juillet. Deux semaines après la nuit de la tragédie. La rue Papineau est plongée dans le noir. Uniquement la rue Papineau, avec, à l’extrémité, l’accès à «ground zero». En fin d’après-midi, les vents et les orages ont été violents. Comme si la nature savait tirer le pire de sa relation avec l’Homme, l’hypocrisie! Des branches tombées sur les fils électriques, des arbres déracinés. Une soupe d’eau et d’huile dans l’assiette du centre-ville.
Rue Papineau, des voitures de police filent, gyrophares allumés. L’urgence, on ne connaît que ça depuis quelques jours. Ce soir, sinistrés encore, rue Papineau. 21h50 ! Qu’est-ce que j’entends? Le sifflet d’une locomotive! Pour la première fois, depuis l’innommable. Ça ne finira donc jamais?
Au coin de la rue, la maison de Marie-Noëlle est déserte. Le dimanche d’avant, ça ne m’aurait pas étonné de la voir sortir une chaise sur la galerie, avec vue sur le dépanneur Chez Pit. Surtout que l’intersection avec Villeneuve et tout le quartier était noir… de monde, ce dimanche-là . Elle aurait vu des tas de motos, des tas d’autos, des tas de piétons accourir, le regard fixé sur le rideau de fer qui ceinture la «scène de crime». Là où il y avait autrefois avant un centre-ville animé.
Marie-Noëlle aurait aperçu, coin Papineau et Québec Central, Christian, le fils de son boss, Raymond Lafontaine, se préparer à retourner derrière le rideau, la «fournaise»! Elle se serait sûrement demandé pourquoi tant de chars de police au pied carré de bitume. Dont un, en particulier, stationné en permanence de l’autre côté de «sa» rue ! Marie-Noëlle dont la vie se conjugue aujourd’hui à l’imparfait, comme celle des 46 autres qui ont eu le malheur de se trouver là où l’enfer a tout engouffré!
Le train siffle, pour une deuxième fois. Comme la corne de brume d’un navire fantôme naviguant dans le brouillard! Des souvenirs! Le matin, un verre de café à la main, Marie-Noëlle file à l’ouvrage. «Où coures-tu si vite à cette allure?» Elle lève la tête, un sourire !
Samedi 29 juin. À Piopolis, devant la marina, j’attends le deuxième passage des coureurs de catégorie junior qui participent aux Championnats canadiens sur route. La pluie forte a cessé. Sortant du restaurant de l’hôtel, Natacha marche nonchalamment en direction du quai. Le voilier de Luc doit y être amarré. «Ce soir, on devait descendre au Théâtre de la Première Scène. Faudra peut-être faire le voyage en auto !» Natacha ne court pas. Ce n’est pas son genre à elle. Plus smooth, la fille. Mais même destin tragique que Marie-Noëlle, la rapide!
Vendredi 5 juillet. Centre sportif Mégantic. Yves est fier. Son groupe Lezor Ganes va se produire à la prochaine Traversée internationale du lac Mégantic. «On va t’envoyer quelque chose pour parler de nous dans le prochain journal», promet Lord Ganes, l’acolyte de Gilly Ganes (Yves). Quelques heures plus tard, un train va lui souffler sa ligne de vie, à Yves.
Rue Papineau. Le 19, toujours dans le noir. Le temps est long, pas de tv, pas de lumière. Juste le bruit des opérations de récupération des wagons dans «ground zero». La même musique nocturne depuis plus d’une semaine. L’enfer bat la mesure.
Henriette, elle, prendrait cela avec le sourire. L’ai déjà vue, rue Frontenac, les roues de son auto enlisées dans un banc de neige. Elle regardait la scène avec son éternel sourire. Ça en prend beaucoup pour qu’Henriette pète sa coche! Une vie à l’imparfait, elle aussi.
Des histoires, des anecdotes. Une nuit, leur vie est arrivée trop vite dans le tournant. Elle a basculé alors que personne ne s’y attendait.
Terminé aussi pour Geneviève qui rêve d’être une star et qui s’accroche, échelon par échelon. Pas facile d’atteindre le firmament des vedettes, Geneviève ! «Je sais, je sais, mais j’y arriverai!»
Tiens, la Craque passe sur son vélo. Pas le gars qui dérange ben, ben; ce soir, il va faire la fête! Il fait tellement beau, c’est l’été!
Des jours et des jours, ces gens-là se sont sentis seuls comme jamais ; le monde autour grouillait comme des fourmis qui se sont faits passer dessus par la tondeuse. Perdus, désorientés… Le centre qui est monté au nord, le sud coupé du centre, heureusement, il y a la voie de contournement ! On dirait qu’y é tombé une bombe s’a rue Principale. Une «méga» bombe! De celle qui brûle longtemps et qui creuse des trous.
19 juillet. 22h34. Le courant n’est toujours pas rétabli, rue Papineau. Et Marie-Noëlle qui n’a pas allumé de chandelle à sa fenêtre! Demain, peut-être! Cet après-midi, juste avant l’orage, une camionnette est passée. «On prépare l’avenir», lisait-on sur la carrosserie! Ben, bonne chance ! Triste tout de même pour celles et ceux dont l’avenir s’est arrêté là , par une belle nuit d’été, au centre-ville.
Des camions et camionnettes lettrés, il continuera d’en passer. Mais pas les celles de MMA. Le grand boss a fait tout disparaître sur les véhicules de la flotte. Des véhicules blancs, désormais! Une virginité retrouvée d’un coup de pinceau. Vite, l’aube, arrive !
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