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Un jeu pervers!
Ce jour-là, on se serait cru à la guerre des étoiles. Attaque, contre-attaque, alliances, coups de semonce, menaces, diplomatie… Tout est parti d’un article du Devoir qui annonçait comme une décision irrévocable la fermeture de l’Observatoire astronomique du Mont-Mégantic. Une date ferme, le 1er avril! Bon, aussi tôt dans l’année, on devine que c’est pas un poisson lancé autour de notre plus puissant moteur touristique régional. La nouvelle s’est répandue comme une traînée de poudre et avant même que le ministre Christian Paradis s’empare de toutes les antennes pour rassurer tout le monde, les scientifiques comme les autres, l’orage grondait à travers tout le pays!
Parmi les réactions offusquées, celle de Daniel Green, le chef adjoint du Parti vert du Canada qui pressentait déjà que le gouvernement Harper allait reculer. «Ce n’est pas vrai qu’après avoir causé la tragédie de Lac-Mégantic par ses négligences réglementaires, le fédéral va maintenant fermer un joyau touristique et économique (…) Est-ce nécessaire de faire mener ce combat à la population de Mégantic?
Ils ont d’autres combats de survie à mener. Laissons-les tranquilles avec les mauvaises nouvelles.»
Il y a eu aussi celle du député de Compton-Stanstead, le néo-démocrate Jean Rousseau, le voisin de circonscription de Christian Paradis, qui n’en revenait tout simplement pas! «C’est aberrant, indéfendable et honteux de couper les fonds à cette institution qui a une réputation internationale», disait-il. En fait, dès le début de son mandat, en 2011, Jean Rousseau a écrit au ministre Paradis pour lui demander une rencontre et lui offrir sa collaboration afin que le financement de l’Observatoire soit assuré, et non pas toujours en mode sursis. Pensez-vous qu’il a reçu une réponse à sa lettre? Pas du tout!
Les milieux scientifiques sont montés aux barricades pour dénoncer les compressions budgétaires qui attaquent les fondements même des institutions qui font pourtant la fierté du Canada à travers le monde. Pour l’astrophysicien Hubert Reeves, le dalaï-lama des scientifiques doté d’un sens de la communication à nul autre pareil qui nous fait nous élever dans les hautes stratosphères, nous les humbles poussières d’étoiles, voilà qui constituait une très mauvaise nouvelle. «Ce serait vraiment catastrophique pour toute la communauté québécoise, scientifique ou non», a-t-il fait savoir à la télévision d’État.
Finalement, comme des marmottes dérangées dans leur sommeil par le tollé général, les conservateurs sont sortis de leur cachette, ont vu l’ombre qu’ils jetaient sur la prochaine campagne électorale avec un laisser-aller aussi stupide et se sont dépêchés de s’ériger en sauveurs de la galaxie! Deux ans de financement assuré. Vingt-quatre heures plus tard, l’Univers pouvait dormir en paix, le ciel ne nous était pas tombé sur la tête! Peut-être une prochaine fois!
C’est fou à quel point une sortie calculée dans les médias peut avoir comme impact. En fait, le conseil d’administration de l’OMM n’en pouvait plus du silence d’Ottawa sur le renouvellement de leur financement et les administrateurs se sont dits qu’avec une telle annonce surprise de fermeture, Ottawa finirait par devoir s’engager, le couteau sous la gorge. C’est connu, les politiciens ont l’épiderme sensible à quelques mois de retourner faire du charme sur les perrons des électeurs.
Résultat final de cette aventure interstellaire d’un jour, les gens d’ici ont eu la frousse de perdre ce qu’ils avaient de mieux à montrer à la visite. Le mont Mégantic sans l’Observatoire c’est comme le Mont Royal sans l’Oratoire Saint-Joseph. Maintenant que ce gros œil tourné vers l’espace est bien en place, faisant rêver tant la communauté scientifique que le commun des mortels, personne n’a le droit d’en menacer l’existence. Ça touche d’autant plus les gens d’ici qu’ils se sont investis corps et âme. Il faudrait taper à la fois sur les doigts des administrateurs de l’OMM qui ont manipulé l’opinion publique à leurs fins et sur ce gouvernement de conservateurs préhistoriques qui laissent leurs fonctionnaires dormir au gaz de «schisme»!
Pas de petite étoile sur le cahier de devoir de nos scientifiques qui auraient pu descendre de leur montagne de haut-savoir pour parler au petit monde et utiliser une meilleure approche que la peur! Soulagement pour eux, l’argent public va rentrer, mais les dommages collatéraux sont faits. Notre moteur touristique a des ratés et ne doit sa survie qu’à des fonds publics versés comme une aumône d’une année à l’autre.
Déjà qu’on donnait l’image d’un lac Mégantic de quêteux depuis la tragédie, on n’avait pas besoin que les conservateurs nous rappellent qu’on leur doit une partie du souffle économique qui rejaillit sur toute la région.
Si l’Observatoire du Mont-Mégantic voulait faire parler de lui, c’est mission réussie. Tout croche ! On sait maintenant que les hommes d’Harper tiennent les scientifiques par les couilles. Quand la lumière est éteinte, ils les écrasent entre leurs doigts et quand la lumière s’allume, ils font semblant de les caresser. Le paradis est-il sur Mars?
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