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Pourquoi le plan d’urbanisme de la zone rouge ne tient pas la route
D’abord, il est invraisemblable que la démarche en cours puisse continuer lorsque la décontamination d’une partie des sols n’est pas encore terminée. C’est sur cette incertitude que la décision de démolition des bâtiments encore debout s’est prise et on est déjà à décider du type de vocation avant même la fin des travaux.
Les auteurs de ce plan d’urbanisme de la zone rouge disent s’appuyer sur la volonté citoyenne en prétextant la participation de 200 à 250 personnes muselées de par le processus de la démarche et constitue moins de 5% de la population de la ville de Lac-Mégantic. Pourtant, dès le début de la démarche, les gens présents ont manifesté de façon claire leur vision future de ce qui était jadis la zone du centre-ville: une zone habitée, verte, un mémorial discret, une préservation du patrimoine bâti et un respect de ce qui est présent. Probablement que je n’ai pas la même lecture ou encore que je n’ai pas été aux mêmes séances.
Le plan actuel semble surtout reposer sur une vision économique et touristique mais, pour moi, il ne tient pas compte des facteurs humains, historiques et climatiques.
En premier lieu, le boulevard des Vétérans était à l’origine une rue résidentielle sauf quatre bâtiments dont un seul avait une vocation touristique et était en retrait, ce qui permettait une quiétude du secteur. Ce dernier bâtiment avait sa raison d’être puisqu’en retrait, discret et en harmonie avec l’entourage. Le boulevard permettait aux citoyens de posséder une propriété résidentielle face au parc et près des berges du lac. Les citoyens de ces résidences ont été évincés de gré ou de force et doivent avoir préséance sans condition ou obstacle pour réparer une partie du préjudice subi par le sinistre du 6 juillet. Dans le plan actuel, la seule possibilité de bâtir une maison pour y vivre dans cette zone se situe dans une deuxième rangée encore plus près de la voie ferrée meurtrière. On n’a pas encore compris, malgré les morts que l’on pleure depuis deux ans. Cette attitude montre l’importance que revêt le citoyen résident dans ce plan.
Concernant cette zone touristique que l’on veut y implanter, elle n’a pas sa place. Le touriste de villégiature de notre région recherche la petite auberge, le gîte pour se dépayser et non une grosse infrastructure comme un gros hôtel au centre d’une ville. C’est d’ailleurs ce qu’ils fuient! J’invite les instigateurs potentiels à visiter ma ville natale Valleyfield qui a eu un projet d’envergure similaire il y a environ 25 ans. L’hôtel a été construit par une chaine hôtelière bien connue face à une baie et un parc où plusieurs activités ont lieu et la même chaine a fermé ses portes faute de clientèle. Il n’est pas suffisant de combler le besoin hôtelier en nombre de chambres mais encore faut-il offrir ce que le client recherche et lui apporter des activités de villégiature. Oubliez la possibilité de créer un centre de congrès, ce genre d’activité se réalise surtout dans les grandes agglomérations. Qu’aurait-on à offrir de plus que la vue sur le lac dans ce monde du tourisme fort vulnérable selon l’économie? A-t-on impliqué les commerçants locaux dans cette niche pour voir le réalisme?
De plus, ce pôle touristique que l’on veut créer vient générer une concurrence directe aux commerçants du nouveau centre-ville de la rue Papineau qui se remettent tout juste de la tragédie, ce qui vient fragiliser ces entreprises dans un petit marché. Le problème était absent lorsque l’ensemble de ces commerces faisait unité. Un choix de pôle commercial a été fait et l’on doit supporter ces gens d’affaires mais non les étouffer.
Aussi, on veut réduire à sa plus simple expression ce qui était la rue Frontenac et pour quelle raison? Cette artère sert de drainage de la circulation dans trois axes vers Woburn, Saint-Georges et Sherbrooke et permet la fluidité de la circulation pour l’automobiliste en transit et qui ne désire aucunement s’arrêter dans un commerce. La voie de contournement ne peut remplir seule ce rôle. La rue Frontenac doit être maintenue dans sa vocation originale pour dégager la congestion routière évidente depuis l’ouverture du nouveau pont de la rue Papineau pour sa clientèle. L’accès de la rue Milette, pour nous les résidents de ce quartier, doit être maintenu. Nous avons assez souffert de sa fermeture durant un an en nous isolant du reste de la ville.
En outre, les citoyens veulent une zone verte. Il n’a jamais été question de créer un troisième parc dans la même zone. Ce nouveau parc en forme de déversement de pétrole qui semble un rappel de la tragédie nous apparaît de très mauvais goût. Il permet une fenêtre visuelle vers le lac qui devient caduc avec l’ouverture du parc des Vétérans. Ce parc comporte un accès pour les véhicules tout terrain qui n’ont pas leur place dans une ville et viendra perturber la quiétude de ce qui reste de notre quartier. Cette zone créée est balayée constamment par les vents du lac et sera peu conviviale. Il serait plus judicieux de maintenir le boulevard des Vétérans résidentiel, créer des accès piétonniers et cyclistes à toutes les cinq à 10 maisons qui feraient un lien avec une piste cyclable au bord de la rue Frontenac ou à l’endroit où se situait la ruelle entre Frontenac et des Vétérans. Des stationnements pour les citoyens et visiteurs du parc des Vétérans pourraient être créés dans ce même espace. Une zone verte pour moi est de permettre aux citoyens résidents qui veulent se rétablir dans cette zone d’avoir des lots plus grands pour se construire que ceux existants afin de pouvoir y insérer plus d’aménagement paysager.
Voilà ce que devrait être le plan futur de cette zone.
Patrice Laframboise
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