Oscar Brochu

À vos rangs!

Dans le tout dernier épisode de Les Pays d’en haut, le damné Séraphin manœuvre sa réélection à la mairie d’un village qu’il a à sa botte depuis des lustres. Et son père y était avant lui! Pour l’heure, sa pire crainte, c’est que pour la toute première fois le vote sera tenu secret! Dans l’urne, pas de magouille, pas de fourberie!

L’épisode tombe à pic, les élections municipales se tiennent à l’automne, partout en même temps sur le territoire du Québec. Encerclez la date du 5 novembre dans le calendrier 2017. Sur le territoire des Pays d’en bas de la carte, c’est chez nous ça, les élus se sont mis en mode réflexion. Reviendra ou reviendra pas? Les paris sont ouverts. Certains maires vont faire durer le suspense, d’autres ont déjà mis carte sur table: terminé à la fin du mandat, je rentre à la maison me tenir au chaud dans les bras de Donalda (ou de Donald)!

Dans notre monde rural, même si l’histoire des Pays d’en haut se déroule à la fin du 19e siècle, à bien des égards la perception du rôle du maire de village n’a pas beaucoup changé. Un rôle pivot. La vie de la communauté tourne autour des politiques municipales qui déterminent l’avoir et l’être. Le maire a le bras long et beaucoup de mémoire!

Sainte-Adèle pourrait nous faire penser à n’importe lequel village. Disons Audet! Petite communauté de 757 citoyens, ce village traverse présentement une crise politique, comme d’autres avant lui en ont connue et comme d’autres après lui en connaîtront. Pas de quoi écrire un téléroman! La mairesse Guylaine Bilodeau est arrivée en poste après le départ d’André Grenier qui a dirigé les destinées de la municipalité pendant un quart de siècle. 25 ans, c’est suffisamment de temps pour vivre la politique municipale comme une seconde nature. Un maire à temps plein qui maîtrise tous ses dossiers. Ce n’était pas évident pour une recrue de chausser ses bottes de travail, à André. Même avec la meilleure volonté du monde, même avec la détermination de changer les choses pour le mieux, de faire sa marque, parfois la recette ne prend tout simplement pas. Et la sauce est gâchée! Quatre démissions chez les conseillers dans les premières années du mandat de la mairesse. Des conflits internes, l’usure du temps et de la charge publique! Et puis arrive l’«étranger». Il s’appelle Liliano! Le gars de la ville qui débarque, le sourire aux lèvres, un ballon de soccer sous le bras. Une expérience de coach, le désir d’en faire un sport pour tous les jeunes à Audet. Le soccer est un jeu qui se joue avec des règles, mais pas les mêmes qu’en politique! Même dans un petit village, «surtout» dans un petit village, t’arrives pas là sans penser ne rien déranger de l’ordre ou du désordre établi. Liliano n’est pas un fauteur de trouble, juste un idéologiste enthousiaste. Il a cru faire du bien, surtout auprès des jeunes. Avril 2016, un poste de conseiller devient vacant. Parce que Liliano a des projets pour ses joueurs, aussi bien se tenir dans le cercle du pouvoir municipal, se dit-il. Ça ne doit pas être sorcier, qu’il ajoute dans sa tête en sifflotant! Finalement, il a démissionné pas plus tard que la semaine passée ou l’autre d’avant, après tout juste dix mois à siéger au sacro-saint d’une table de conseil! Le cinquième démissionnaire! Il rentre dans le rang, dans son rang, un peu beaucoup désillusionné de son expérience en politique! D’autres vont imiter son geste, il paraît! Pas par solidarité envers Liliano, mais parce qu’eux aussi, ils en ont marre. Un conseil en crise ça contamine la vie d’un élu et parfois d’un village. Les gens se pointent du doigt, des regards en chien de faïence, c’est sa faute à elle, c’est sa faute à lui! L’incompréhension de l’un vire au mépris de l’autre. Liliano n’est pas musulman, il est issu de la communauté italienne, vous l’aurez deviné. Liliano ne cuisine pas du halal, il sert des pâtes. Et des maudites bonnes pâtes, à part ça! Ce que Liliano ne savait peut-être pas c’est que, quand tu débarques dans un village, t’es mieux de faire profil bas. Parce que ton petit paradis peut aussi te faire vivre l’enfer si tu en brasses trop la braise.

Audet va perdre des conseillers, va perdre sa mairesse au terme de son mandat, mais le village va finir par s’en remettre et continuer d’exister comme il le fait si bien depuis 113 ans!

Je suis curieux! Comment la population du village a-t-elle brassé et distribué les cartes au début de la colonie? Petit retour dans le temps, petit voyage historique de 100 ans, par un simple clic sur le site officiel de la municipalité. «Antérieurement à l’année 1917, il y avait sept conseillers. L’un d’eux était désigné pour présider le Conseil municipal et ce dernier exerçait les attributions dévolues au maire, pour une année seulement. Le maire sortant était rééligible aussi longtemps qu’il était membre de ce même Conseil municipal. À partir de 1917, il n’y aura plus que six conseillers. À l’avenir, le maire sera nommé pour deux ans et n’importe lequel contribuable équitablement qualifié peut être désigné pour occuper ce poste.»
Soulignons «n’importe lequel contribuable équitablement qualifié». Comment le définir? N’importe qui, en fait. On l’a vu à Lac-Mégantic il y a deux ans. Alors, oui, Audet a aussi un avenir, peu importe avec qui à la mairie. L’ex-préfet Maurice me confiait l’autre jour : «Quand quelqu’un me dit s’intéresser à la politique municipale, je n’ai jamais le réflexe de le décourager. L’important, c’est de le faire pour les bonnes raisons. Pour servir la population.»

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