Oscar Brochu

Ce que vous devez savoir sur la santé du lac

Cela fait un peu plus de deux ans que je m’intéresse aux ressources hydriques du lac Mégantic, son niveau d’eau établi et ses fluctuations. L’élément déclencheur de cet intérêt : sa beauté et celle de son marais ne me semblent plus celles que j’avais dans mes souvenirs des trente dernières années. Certains témoignages d’observations sur plusieurs décennies m’ont choquée. Des questions sans réponse m’envahissaient.

Dans une étude parue en 1991, on évoquait la majestuosité de notre marais, qu’il était le plus grand marais de l’Estrie, L’Association pour la protection du lac Mégantic relate d’ailleurs la même information dans son dépliant Quiétude sur le lac. On peut y lire : «Avec une superficie de 10,68 km carrés, le marais représente la plus grande zone humide au sud du fleuve Saint-Laurent». Mais alors, que s’est-il passé en trente ans?

À la recherche d’indices, je me suis donc concentrée, avec de l’assistance, à débusquer ce qui existait comme études et ouvrages scientifiques sur le lac. Ils sont peu nombreux et rien de bien récent en ce qui concerne le niveau du lac et la santé du marais. On peut lier, dans une étude du Comité de bassin de la rivière Chaudière (COBARIC) que le marais n’est pas dans sa plus grande forme. Une autre étude parue en 2010, et aussi la plus récente concernant ma préoccupation, mentionne que le marais s’assèche. Dans l’histoire du lac Mégantic, il y a eu deux baisses importantes du niveau de l’eau depuis 1920. Ce sont des baisses draconiennes, d’un seul jet et sans étude d’impact en appui, de 30 centimètres chacune, pour un total de 60 centimètres, exécutées en 1974 et en 1993. La raison évoquée de la dernière baisse consistait à contrer l’érosion et libérer les plages. Dans les premières années suivant la deuxième baisse, une étude rapportait déjà une diminution de la superficie du marais et une progression de l’herbier dans le lac. Cette étude a été faite il y a… 27 ans!

 J’essayais de trouver des explications à la situation actuelle, mais aucune ne semblait me satisfaire. Des informations semblaient m’échapper. Mais voilà que la découverte de deux éléments capitaux m’a permis d’établir des liens, d’attacher ensemble ces bouts de connaissances et leur donner enfin un sens. D’abord, l’existence de bornes d’assèchement et d’inondation du marais, définies dans l’étude de Maisonneuve de 1997, permet d’évaluer l’impact du niveau du lac sur son marais. Il ne manquait que les mesures du niveau de l’eau du lac pour les comparer à ces bornes. Eureka ! Un ami travaillant au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques m’a montré exactement où trouver ces valeurs. C’était une véritable mine d’or ! En fait, ce ministère prélève les mesures hydriques journalières et mensuelles du niveau d’eau de ses barrages et celui du lac Mégantic en fait partie. Des valeurs remontant jusqu’à 1920 sont publiquement accessibles sur son site web.

 Il a fallu utiliser quelques méthodes statistiques pour faire «parler» ces valeurs. Les résultats permettent d’appuyer deux constats : les mesures du niveau de l’eau depuis la baisse de 1993 sont significativement différentes de celles de la précédente baisse ; le niveau moyen de l’eau entre 1993 et 2018 atteint la borne d’assèchement du marais deux mois et demi par année. Mais c’est dans un intervalle de 10 cm du niveau d’assèchement que se situe pendant quatre mois et demi le niveau du lac. Et ceci est prévisible d’une année à l’autre depuis 29 ans!

Quatre mois et demi par année où le marais ne livre pas adéquatement, ou pas du tout, ses services. J’en suis demeurée estomaquée. L’étude de Maisonneuve mentionne que les deux fonctions principales d’un marais sont de maintenir une bonne filtration des eaux vers un lac et maintenir un équilibre écosystémique de la biodiversité qui l’entoure. Je sais également que si un segment de l’écosystème fait défaut, les répercussions peuvent affecter tout le bassin versant. La sonnette d’alarme retentissait et il fallait partager cette découverte.

Ce partage d’information, mon équipe et moi l’avons fait à différents ministères, organismes et un élu municipal. J’ai aussi eu l’occasion de discuter du sujet avec le député provincial afin de le sensibiliser à la problématique, et j’espère qu’il pourra nous présenter sa va position officielle d’ici la fin de l’année. Mais enfin ! L’analyse de nos données et la présentation de nos résultats ont été suffisamment crédibles pour faire mandater, grâce au COBARIC, un projet d’étude sur la santé du lac et de son marais. Une première en 23 ans ! Il faut mentionner que ce projet est entièrement subventionné par des fonds de recherche. Aucun sou provenant des mairies riveraines, du moins pas pour cette année, car on nous a dit que la population ne serait pas favorable, pour l’instant, à ce que nous dépensions autant d’argent sur tant de projets qui concernent le lac: stations de nettoyage, barrage au lac Aux Araignées, lutte contre le myriophylle à épis, lutte contre l’érosion, la sédimentation, etc.

Pourtant, ce sont les élus qui ont demandé qu’une telle problématique sur le lac soit documentée avant d’exercer leur pouvoir décisionnel. Je voulais donc partager ces informations, car la santé du lac est l’affaire de tous les citoyens. Je voudrais que vous preniez acte et responsabilité, car ce n’est pas l’affaire d’une citoyenne, d’un seul organisme ou d’un seul élu de s’approprier le défi de convaincre ou d’éveiller une population aux problématiques de son lac. Il importe de sensibiliser cette dernière que la santé du lac et de son marais fait aussi partie de ce bien commun. Il est essentiel que tout citoyen, qu’il soit riverain, plaisancier, baigneur ou campeur, puisse jouer un rôle pour soutenir notre bien commun qu’est le lac Mégantic. 

Nancy Paradis et son équipe

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