Des intervenants déçus, mais déterminés à poursuivre la bataille, cette fois sur le plan judiciaire.
Jugeant de mauvaise foi le gouvernement fédéral qui choisit d’exproprier les parcelles de terrains nécessaires à la réalisation du projet de construction d’une voie de contournement ferroviaire à Lac-Mégantic, avant même que l’Office des transports du Canada ait rendu sa décision sur la demande déposée par CMQR, une filiale à part entière de la compagnie Canadien Pacifique Kansas City, tant les membres de la Coalition des victimes collatérales, l’UPA Estrie, le Syndicat des Producteurs forestiers du Sud du Québec et les avocats des opposants au projet entameront des procédures judiciaires en cour fédérale visant un pourvoi en contrôle judiciaire, associé à une injonction provisoire afin de bloquer l’expropriation.
Dans la salle communautaire de l’hôtel de ville de Frontenac, ce mardi 20 juin, la tribune est occupée par le maire de Frontenac, Gaby Gendron, les trois avocats au dossier des opposant aux avis d’expropriation, Francis Paré, Jean-Claude Boutin et Daniel Larochelle, le président du Syndicat des producteurs forestiers du Sud du Québec, André Roy, le président de l’UPA-Estrie, Michel Brien, et la citoyenne Yolande Boulanger, représentant la Coalition des victimes collatérales de la voie de contournement. L’atmosphère n’est pas aux réjouissances, moins d’une semaine après que la ministre des Services publics et de l’Approvisionnement Helena Jaczek ait officiellement annoncé la décision d’aller de l’avant dans le dossier des expropriations demandées par son collègue le ministre des Transports Omar Alghabra.
Selon l’avocat Francis Paré, cette décision ministérielle est prématurée. «C’est l’Office des transports du Canada qui, en vertu de l’article 98 de la Loi sur les transports, détermine les nouveaux tracés ferroviaires. Or, le gouvernement se tient toujours un p’tit peu au-dessus des lois. On ne s’enfarge pas avec les petits problèmes comme les citoyens, le droit de propriété, c’est pas important ça pour le gouvernement qui agit dans ce dossier-là de manière cavalière depuis le début. Au préalable, ça prend cette décision-là avant d’aller aux expropriations. C’est un je m’enfoutisme du gouvernement, dans l’aspect acceptabilité sociale, on rate la cible. On essaie d’enlever du poids aux référendums qui ont été fait. C’est clair comme de l’eau de roche. La réponse de la ministre est de se rapporter à un groupe Facebook Lac-Mégantic sur internet, comme si c’était sérieux plus sérieux (que les sondages téléphoniques).»
La contestation devant les tribunaux va se mettre en branle rapidement, promet l’avocat Boutin. «On veut agir avant le délai du 1er août. Encore une fois, ici, on met de côté les lois. La loi prévoit un délai de 90 jours, mais le gouvernement décide que c’est pas vraiment applicable dans ce cas-là. Pourquoi? Aucun motif n’a été donné. On ne comprend pas sa hâte d’agir. On comprend pas pourquoi on veut encore mettre le feu aux poudres. Les gens qui sont pris par cette situation-là sont écoeurés de voir ce qui arrive. On attise le feu! On les crinque encore plus. Avec le recours judiciaire c’est un juge qui va trancher. Le gouvernement ne pourra pas se défiler. On va avoir une vraie décision et on va savoir qu’est-ce qui se passe. La juge va regarder tous les documents et le gouvernement va être obligé de produire à la cour tous les documents qu’on veut.»
«Personnellement, je vis un cauchemar depuis dix ans», a lancé Yolande Boulanger, la voix trahissant un flot d’émotions face aux abus de pouvoir injustifiés du gouvernement Trudeau, nomme-t-elle.
«Manifestement, la ministre n’a pas lu le rapport (d’audience de Me Julie Jubinville, qui lui a été remis le 25 mai), expose André Roy. La ministre affirme dans sa réponse que l’emprise a été quelque peu élargie. On sait que dans Frontenac, l’emprise a été doublée dans certains endroits. Cinq fois plus dans le cas de la ferme de Yolande Boulanger. On donne aux mots le sens qu’on veut bien donner! Nous on sait très bien qu’il n’y en a pas d’acceptabilité sociale régionalement. La réponse, elle n’est pas décevante parce qu’on ne peut plus être déçu par les réponses de ce gouvernement-là. On ne peut plus être surpris ni déçu, parce qu’on va de déception en déception dans ce dossier-là, depuis des mois et des années. C’est la première fois qu’on traite des lois avec une telle désinvolture (en parlant des milieux humides qui seront détruits pour faire place à la voie ferrée).»
Son doigt accusateur demeure fixé sur les élus «En même temps, nous nous interrogeons sur l’indifférence des élus fédéraux et québécois qui refusent de prendre position sous prétexte qu’ils ont fait une promesse appuyée sur des études incomplètes et désuètes. Il est encore possible d’éviter une autre catastrophe écologique, humaine et financière dans une population qui a assez souffert de la négligence des instances responsables de sa sécurité et du bien-être des citoyens.»
Anecdote de coulisses au récent congrès de la CAQ, le président de l’UPA Martin Caron aurait été interpellé par un député caquiste le priant de s’occuper de ses vaches au lieu de se mêler du dossier de la voie de contournement ferroviaire. Le président de l’UPA-Estrie, Michel Brien, a entendu parler de l’accrochage. «Cela prouve que nous défendons bien l’intérêt de nos membres», réagit-il.
Pourquoi Rémi Tremblay, ton article ne parait pas dans le journal local. Il est pourtan très pertinent.