Oscar Brochu

Servir la justice

Un anniversaire est passé sous silence en 2010, celui soulignant les 25 ans de création du district judiciaire de Mégantic. Les officiers de justice ont établi leur palais à l’intérieur de l’hôtel de ville de Lac-Mégantic en 1985. Cette année-là, un grand pas venait d’être franchi vers un service de justice plus humain, plus efficace et surtout plus près des commettants. On venait ainsi de mettre fin à une absurdité géographique et historique qui faisait en sorte qu’un crime commis d’un côté de la rivière Chaudière était entendu et jugé dans le district de Beauce, à Saint-Joseph, alors que de l’autre côté, on se référait au district de Saint-François, à Sherbrooke.

L’esprit même des deux solitudes qui habitait, à l’époque, les secteurs Sainte-Agnès et Notre-Dame-de-Fatima.

Dans les faits, le premier procès présidé par un juge à Mégantic date de 1889, et ce n’était pas Donald Morrison que l’on jugeait! Ce premier jalon s’appelait la «cour de magistrat». Depuis 1944, il y avait bien une cour des sessions de la paix, mais elle entendait uniquement les causes relevant du district judiciaire de Saint-François. Plus tard, en 1979, Lac-Mégantic hébergeait quatre cours différentes, dont le tribunal de la jeunesse, avec des territoires à desservir différents d’une cour à l’autre.

Il y a vingt-cinq ans, l’État du Québec a finalement compris qu’il économiserait beaucoup d’argent au niveau de l’administration pénale, notamment en frais de déplacements et en temps supplémentaires des agents de la SQ, appelés jusque là à faire la navette avec leurs suspects entre trois districts judiciaires différents, Beauce, Saint-François et Frontenac.
En 25 ans, bien malin serait celui qui pourrait évaluer le nombre de dossiers qui ont été traités au palais de justice de Lac-Mégantic par la petite équipe qui y travaille. L’occasion aurait été belle, en 2010, de souligner leur contribution aux efforts déployés par le législateur et les corps de police pour faire de cette région un milieu de vie plus sécuritaire.

C’est la récente grève (tout à fait légale puisque ce droit a été obtenu en 2003) des juristes et des procureurs des poursuites criminelles et pénales qui aura permis d’attirer l’attention sur un problème criant: oui, nous sommes tous pour la vertu en souhaitant plus de sécurité et plus de justice, mais est-ce que nous offrons à ceux et celles qui ont la grande responsabilité de défendre les citoyens contre les criminels de tous acabits, tous les moyens pour faire échec aux criminels?

Oublions les demandes salariales qui n’ont pas été exaucées et l’écart important qui les sépare de leurs confrères des autres provinces canadiennes. L’attitude du ministre de la Justice, Jean-Marc Fournier, à l’égard de ses procureurs, avec le recours à une loi spéciale forçant leur retour au travail, n’avait rien pour indiquer une quelconque volonté de renforcer le service de la justice aux citoyens. Rien. Au contraire, c’est à se demander si le ministre en question, plus «stratégique» du temps où il évoluait comme vice-président principal à la planification chez SNC-Lavalin, ou encore plus récemment comme premier secrétaire du chef de l’opposition à la Chambre des communes, suivait des intérêts plus «obscurs» pour se faire tant haïr de celles et ceux qui portent la lourdeur administrative judiciaire sur leurs épaules.

Le cynisme, c’est sa spécialité à lui, Jean-Marc Fournier. On pourrait même créer tout un ministère à sa mesure. Le ministère du cynisme et du mépris!

Ceux qu’on appelait jadis les procureurs de la couronne n’ont pas toujours joué le rôle de victimes d’une injustice infligée par l’État. On en a soupçonné certains de faire preuve de complaisance et de magouilles pour réussir à éviter la prison à des criminels notoires comme à de simples conducteurs pris en flagrant délit de conduite en état d’ébriété. On en a même soupçonné d’autres d’accepter des pots de vin pour faire abandonner des charges avant que les causes se retrouvent en cour.

Mais, si on accepte que l’État les traite avec si peu de respect, en glissant leurs revendications sous le tapis d’un coup de balai magique, quel genre de message l’État lance-t-il aux bandits de grands chemins et à cette petite racaille qui ne trouve rien de mieux à faire pour passer le temps que de hanter la quiétude des honnêtes gens, en rapinant d’un bord et de l’autre.

On pensera ce qu’on voudra du gouvernement conservateur, mais sa détermination à serrer la vis autour des sentences bonbons et des rabais de peines, envoie un message beaucoup plus clair que celui que vient d’envoyer le ministre Fournier, qui se résume à peu près à ceci: bar open pour les crapules et la rapace, puisque, si vous êtes pris dans les filets de la police, nos procureurs déjà surchargés de travail n’auront pas le temps ni les moyens de vous envoyer à l’ombre avant longtemps! Ce qui fait que des enquêtes policières complétées depuis longtemps tardent à aboutir à des condamnations, sinon après des mois et même des années à traîner au tribunal, report après report.

Éloignée des grands centres, notre région ne souffre pas d’une aussi importante criminalité. Pas encore, mais ça viendra, parce que les voyous se passent le mot et commencent à découvrir, comme les touristes, que l’avenir pour eux se dessine dans le ciel de Mégantic. Surtout que Québec n’est pas pressé de fournir à la population un service de justice acceptable. C’est peut-être ça la stratégie de Jean-Marc Fournier, affaiblir l’institution, puis la refiler à rabais au gouvernement fédéral!

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