La symphonie des finissants

Ce matin, lorsque je suis entré dans la salle publique des grands, j’ai eu un pincement au cœur: vous n’étiez plus là. Éric, Camille, Bradley, Marie-Pier…vous aviez tous disparu. Chers finissants, vous avez achevé votre parcours et réalisé les objectifs que vous vous étiez fixés au début de votre secondaire. Savez-vous à quel point vous êtes extraordinaires?

Je dois aujourd’hui vous l’avouer, je vous ai joué un vilain tour en vous enseignant la musique: en effet, je vous ai connectés sur le monde du sensible et celui-ci est plus que jamais à votre portée. J’aimerais toutefois apporter un bémol: je ne suis pas réellement désolé. À travers les mélodies sereines ou dramatiques que vous avez interprétées le cœur rempli, vous êtes devenus des porteurs de lumière sensibles aux nuances de la vie. Rappelez-vous la palette du peintre: en première secondaire, il n’y avait que le bleu, le jaune et le rouge. À l’époque, nous étions prudents, et nous n’avions que le do central comme repère. Aujourd’hui, vous pouvez fabriquer de vous-mêmes des teintes de marron ou d’orangé: vous prenez des risques. Des risques qui sont, plus souvent qu’autrement, profitables et colorés de bonheur. Cette assurance, vous l’avez acquise en donnant le meilleur de vous-mêmes, et parfois, davantage. Ces trois notes que vous peiniez à interpréter le souffle court à l’instrument se sont transformées en symphonies majestueuses. Savez-vous à quel point vous êtes formidables?

Je ne peux passer sous silence à quel point vous avez transformé ma vie. Sans vous, je ne pourrais être l’enseignant que je suis aujourd’hui, plus habile à transmettre mes savoirs et surtout…moins colérique. Jimmy, tu penses parfois que tu m’as rendu la tâche plus difficile, au contraire: tu m’as appris à être plus tolérant et patient envers moi-même et envers mes élèves. C’est une réussite que je te dois et je t’en remercie. Sais-tu à quel point tu es incroyable? Sais-tu à quel point tu peux devenir ce leader lumineux que j’ai toujours vu en toi?

Pour la plupart, vous n’interpréterez plus jamais de musique dans votre vie. J’ai pourtant un secret à vous chuchoter à l’oreille: la musique restera à jamais gravée dans votre cœur. Au-delà du temps et de l’espace, la musique vous guérira et vous permettra de guérir les autres. Car vous avez appris à être tolérants, justes, sévères. Vous savez qu’en travaillant de façon ardue, vous vivrez toujours des dépassements, quel que soit votre métier dans la vie. Vous êtes maintenant convaincus qu’en fournissant davantage, on obtient davantage. Vous connaissez les subtilités. Vous percevez le silence. Vous arrivez à stopper le temps. Vous connectez avec le grand créateur, quel qu’il soit dans votre vie, et personne ne pourra jamais vous l’enlever. Savez-vous à quel point vous êtes miraculeux?

Chers finissants, aujourd’hui je dois vous demander un dernier devoir (Samuel, inutile de me dire que ton chien l’a mangé): celui de répandre cette lumière qui vous incarne sur le reste du monde. Demain, vous tiendrez les rênes du Québec, une province fragilisée et brisée par l’avidité des grands stratèges, et on demandera votre courage pour réparer les ponts cassés. Il n’y a pas lieu de s’affliger, car j’ai entièrement confiance en vous. Megan, Gabriel, Rémy, Justine…vous êtes des êtres remplis de lumière, de bonté, et d’amour. Certes, votre parcours au secondaire est terminé, mais la vraie vie commence, celle de bâtir votre symphonie et en même temps, d’harmoniser celle des autres. Savez-vous à quel point vous êtes merveilleux ? Savez-vous à quel point vous êtes porteurs d’espoir et de lumière?

Alexandre Mongeon
Enseignant en musique